Un autre service que M. de Laplace a rendu, par cette Traduction, c’est d’avoir ouvert une source, où ceux de nos Auteurs qui n’entendent pas l’Anglois, peuvent aller puiser des idées, des situations, des caracteres, des sujets même, pour le naturaliser ensuite sur notre Scène.
Celle du Maréchal de Luxembourg, celle du Duc & de la Duchesse de Bourgogne, dont le texte est aussi heureux que le sujet en étoit affligeant, seront toujours regardées comme un des plus beaux monumens de l’éloquence de la Chaire.
On eût pu cependant se dispenser d’imprimer ses Lettres, dépourvues d’instructions & d’agrément ; il n’y a guere que celles qu’il écrivit sur le Voyage de la Cour, à Fontarabie, au sujet du mariage du Roi, qui vaillent la peine d’être lues.
Le droit que le pacte social donne au souverain sur les sujets ne passe pas, comme j’ai dit, les bornes de l’utilité publique. […] Comme dit Montesquieu quelque part12, « cela donne à l’Etat de mauvais sujets et de mauvais fidèles. » Il y a peu d’Etats plus mauvais que ceux qui sont gouvernés dans cet esprit. La plupart des gouvernements ont, cependant, au moins cette tendance ; mais surtout ceux des pays où l’esprit catholique a longtemps dominé et où chaque gouvernement, comme par atavisme, se prend pour un Louis XIV, prétend que ses sujets doivent penser comme lui, estime qu’il y va de l’Etat si les sujets ont une seule idée différente de celles de Sa Majesté ; et pratique la religion d’Etat, même sans le savoir, par une sorte de tradition, d’aptitude innée, de geste machinal et de mouvement réflexe. […] Le prince compte sur ses sujets et les sujets sur le prince. […] Voilà, monsieur, un sujet pour vous.