Merlin y raconte lui-même ses années d’études et de première jeunesse, son temps de séminaire et de noviciat ecclésiastique, ses velléités de vie religieuse et d’entrée au cloître, presque aussitôt dissipées et suivies d’une émancipation complète. […] Un autre chartreux, de Thionville, dom Ignace Jaunez (oncle de Mme Hoche), lequel, en sa qualité de sacristain, avait le droit d’entrer dans les pavillons, venait me chercher dans ma chambre vers onze heures ou minuit ; je vois encore ce spectre blanc, aux yeux caves, avec la tète encapuchonnée, avançant sous mes yeux sa lanterne sourde, et prononçant Ave Maria, à quoi, me levant pour le suivre, je répondais Amen. […] Gardez-vous donc de devenir chartreux… » Et tout ce qui suit. — Et l’on conçoit, en effet, cet enfer de la réclusion et de la solitude, quand la contemplation mystique n’est plus qu’un vain mot, et que le rayon céleste ne descend plus.
Teulet, ce modèle de l’éditeur historique consciencieux et grave, nous apportera des séries complètes et suivies des relations de la France et de l’Écosse au xvie siècle. […] Ce qui est plus certain, c’est qu’il avait passé les dix années qui avaient suivi sa sortie du Parlement, tantôt à la Cour et mêlé à plus d’une négociation, tantôt dans son château à composer ses Essais. […] Montaigne aimait et admirait fort son père, « l’âme la plus charitable et la plus populaire qu’il eût connue. » Mais lui, il n’est point tel ni débonnaire de nature et d’humeur à ce degré ; il n’est point disposé à être, comme son père, perpétuellement agité et tourmenté des affaires de tous ; il confesse ne pouvoir le suivre et l’égaler en cela ; il n’est pas homme à se jeter à tout moment, comme un Curtius, dans le gouffre du bien public.
Puis on n’en rencontrait plus que l’année suivante, à la même époque, au même lieu, à ce point qu’il semblait que c’était le même émigrant qui revenait. » Tout ceci est du chasseur autant que du naturaliste ; ce qui suit est particulièrement du peintre : « Des tourterelles de bois arrivaient en mai, en même temps que les coucous. […] Olivier d’Orsel son ami est, au contraire, un amoureux pur, un homme qui, quand il suit une piste féminine, s’y attache uniquement, et qui ne se consolerait pas de la manquer. […] C’est égal, de quelque côté qu’on la prenne, cette fin laisse, selon moi. à désirer ; et, comme dans un certain nombre de romans vrais, mais auxquels il fallait un dénouement, je suis bien sûr qu’ici, s’il y a quelque réalité dessous, la vérité n’a été suivie que jusqu’à un certain point et jusqu’à un certain endroit.
Il s’agissait, pour ce peuple errant et dispersé, de se donner un rendez-vous à l’extrémité du lac de Genève, à Bex, aux portes du Valais, d’entrer en Savoie, « de l’effleurer par le territoire de Saint-Maurice, de passer à Martigny, de suivre la vallée du grand Saint-Bernard jusqu’à Orsières, de remonter le val Ferret, puis traverser le col Letrevre, descendre à Courmayeur, passer de là au petit Saint-Bernard, tourner ainsi le Mont Blanc, et venir retomber en Savoie entre le col Bonhomme et le mont Iseran du côté de Scez, sur la route qu’avaient reconnue leurs premiers éclaireurs. » Cet itinéraire habile et hardi ne fut pas suivi comme il avait été tracé d’abord ; le premier projet échoua ; la pratique et la nécessité en suggérèrent un autre : ce fut à Prangins, près de Nyon, que le rendez-vous patriotique eut lieu ; on traversa le lac à cet endroit (16 août 1689) ; on passa par Cluse, Sallanches, on attaqua le Mont-Blanc et le col du Bonhomme par un autre côté. […] Pour lui, heureux d’avoir fait son devoir et contenté son maître, il se félicita presque de n’avoir plus à suivre pour le reste de la campagne que les ordres de Versailles.