Je me souviens avoir entendu souvent critiquer cette mélancolie romantique attribuée à une âme antique. […] les corps au sein de la terre, leur souvenir au sein des âges ! […] On se souvient de la terrible scène où la mère d’Olympe le cabas au bras et le tartan au dos, arrive de Paris à Berlin, où son gendre est attaché d’ambassade, pour tirer son épingle du grand jeu de sa fille. […] Tout le monde se souvient du succès de la Ciguë, cette charmante comédie athénienne. […] Ils affectent peut-être un peu trop les idiotismes et les tournures de Molière, et, comme ils sont mêlés, dans ce drame qui se souvient aussi de la Marion Delorme de Victor Hugo, aux rythmes et aux formules de la poésie moderne, il en résulte parfois de singulières dissonances.
Pourquoi, parmi tant de souvenirs de l’Iliade repris et entraînés dans les flots du poëte thébain, n’a-t-il pas cité, du moins en preuve de l’unité d’Homère, un des plus beaux témoignages qui aient été jamais rendus par le génie à sa propre puissance, pour flétrir l’injustice et faire durer la gloire ? […] Il lui emprunte surtout, comme dans son ode célèbre au comte du Luc, ce qui est le plus passager et tient le moins au cœur de l’homme, les souvenirs mythologiques, l’enveloppe de la fiction, le manteau et non la voix du prophète. […] Mais ces grands spectacles de terreur et de bruit, que nos régions tempérées n’offraient pas à l’évêque de Meaux, il les voyait en souvenir ; et la Bible lui ouvrait tout l’Orient. […] Un court fragment, que tous les traducteurs ont négligé, confirme ce souvenir et semble le salut d’entrée du génie venant frapper à la porte du temple et offrir son aide, pour la défense de la patrie commune. […] « Ce que je dois faire pour te plaire, ô dieu de la foudre, fils de Cronos, pour être aimé des Muses et pour rester sous la garde du calme heureux de l’âme, voilà ce que je demande de toi12. » Une telle foi, un tel amour devaient inspirer d’autres images que les souvenirs de la fable, un autre sublime que celui d’Homère.
Je ne crois pas qu’il y ait rien de plus parfait dans le genre pur du sermon que ce discours qui fut fait pour le mercredi des Cendres (1672), et qui a pour texte le Memento : « Souvenez-vous, homme, que vous êtes poussière, et que vous retournerez en poussière. » Tous les mérites de Bourdaloue y sont réunis. […] Souvenez-vous, et pensez ce que c’est que l’ambition et la cupidité d’un homme qui doit mourir. — Vous délibérez sur une matière importante, et vous ne savez à quoi vous résoudre : Memento. Souvenez-vous, et pensez quelle résolution il convient de prendre à un homme qui doit mourir. — Les exercices de la religion vous fatiguent et vous lassent, et vous vous acquittez négligemment de vos devoirs : Memento. Souvenez-vous, et pensez comment il importe de les observer à un homme qui doit mourir. […] La foi avec tous ses motifs n’y ferait plus rien : dégagés que nous serions de ce souvenir de la mort, qui, comme un maître sévère, nous retient dans l’ordre, nous nous ferions un point de sagesse de vivre au gré de nos désirs, nous compterions pour réel et pour vrai tout ce que le monde a de faux et de brillant ; et notre raison, prenant parti contre nous-même, commencerait à s’accorder et à être d’intelligence avec la passion.
Des divers ouvrages qu’il a publiés et qui sont à emporter en voyage, on peut surtout conseiller ses Promenades dans Rome ; c’est exactement la conversation d’un cicerone, homme d’esprit et de vrai goût, qui vous indique en toute occasion le beau, assez pour que vous le sentiez ensuite de vous-même si vous en êtes digne ; qui mêle à ce qu’il voit ses souvenirs, ses anecdotes, fait au besoin une digression, mais courte, instruit et n’ennuie jamais. […] Les souvenirs de 1815 et du retour de l’île d’Elbe y sont racontés avec détail et avec le feu d’un contemporain et presque d’un témoin : le passé chevaleresque y est senti avec noblesse. […] Beyle a combiné avec les souvenirs de sa lecture d’autres souvenirs personnels de sa jeunesse, quand il partait à cheval de Genève pour assister à la bataille de Marengo. […] Charles Monselet, ont parlé de lui tour à tour ; il y a à s’instruire sur son compte à leurs discussions et à leurs spirituelles analyses ; mais s’ils me permettent de le dire, pour juger au net de cet esprit assez compliqué et ne se rien exagérer dans aucun sens, j’en reviendrai toujours de préférence, indépendamment de mes propres impressions et souvenirs, à ce que m’en diront ceux qui l’ont connu en ses bonnes années et à ses origines, à ce qu’en dira M.