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1477. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre septième »

Si Louis XIV eût été capable d’une telle petitesse de sentiments, il n’aurait plus le droit de donner son nom à son siècle. […] Qu’il y ait eu dans ses sentiments une secrète complaisance pour lui-même, le nier est presque aussi oiseux que le rechercher. […] Moins d’un an après l’oraison funèbre de la reine d’Angleterre, Louis XIV le chargeait de celle de Henriette, duchesse d’Orléans, qu’il avait, comme confesseur, aidée à mourir, et dérobée, dit-on, au sentiment des plus horribles souffrances par l’onction de sa parole. […] Il n’en retint que la profondeur et ce vif sentiment des misères humaines qu’elle a exprimé par une si grande variété d’images tirées de la vie. […] Malgré ces inégalités de la faveur de Louis XIV pour les lettres et les écrivains, c’est à la fois d’instinct, et par un sentiment d’équité, que la France a rapporté à ce prince la grandeur littéraire de son temps.

1478. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

Comme on peut le pressentir, la grande valeur du livre est dans l’observation des nuances les plus délicates des sentiments les plus intimes. […] L’entrevue du père et de la fille est très significative ; si le père éprouve un mouvement de tendresse pour cette créature dont l’enfance s’est passée loin de ses yeux, celle-ci ressent un bien autre sentiment. […] Il verse la vie dans tout ce qu’il aime C’est par le sentiment que les semences du bien sont jetées sur le monde. […] Sur le tapis, des souliers à boucles se tenaient gentiment accouplés les talons réunis et les pointes séparées, comme s’ils eussent d’eux-mêmes le sentiment du beau maintien. […] Ils témoignèrent leurs sentiments à mon égard en essayant de m’assommer à l’aide de coups de poing américains et autres instrument variés.

1479. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite et fin.) »

« Pour moi, mon cher baron, j’ai pour vous les mêmes sentiments que vous m’avez toujours connus, et je suis pour la vie tout à vous. […] Ce n’est pas que ses sentiments sur le fond des choses eussent le moins du monde changé. […] Ce qu’il y a de certain, c’est que, la croyant plus mal, M. de Talleyrand était accouru, et il avait paru étonné de la trouver passablement : « Que voulez-vous, dit-elle, c’est d’un bon effet pour les gens. »  M. de Talleyrand, après un moment de réflexion, reprit : « Il est vrai qu’il n’y a pas de sentiment moins aristocratique que l’incrédulité52. » La duchesse avait donné à sa fille, pour lui enseigner la religion, un jeune abbé, homme d’esprit et dont la réputation commençait à s’étendre. […] Villemain, je conçois très bien, par les sentiments et les passions quasi légitimes qui régnaient alors dans toute une partie de la société et de la nation, qu’il ait fait son fameux compliment à l’empereur Alexandre. […] « Mais je m’aperçois que je porte de l’eau à la fontaine, tandis que je ne veux que vous offrir tous mes sentiments empressés de bon et dévoué collègue.

1480. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVIIe entretien. Poésie lyrique » pp. 161-223

Le plus noble et le plus saint des sentiments de l’homme, la piété, soit qu’elle gémisse, soit qu’elle implore, soit qu’elle contemple, soit qu’elle se plonge dans le sacré délire de l’adoration, s’exhale en hymnes et fait éclater par le chant ses extases. […] Excepté le vieux cuisinier Joseph et la Jumelle, personne dans la maison ne se doutait de ce sentiment contenu du petit Didier. […] Mais la Jumelle s’en était aperçue depuis longtemps à elle toute seule ; sans se rendre compte de ses sentiments, elle prenait sa voix la plus douce en lui parlant ; elle recevait, à table, à la maison ou dans les champs, tous les petits services qu’il lui rendait instinctivement, avec une familiarité confiante et avec une sorte de plaisir muet qui contrastait avec les exigences et les railleries des autres jeunes filles. […] XVII Cette explosion de son âme ignorante et simple donna à sa voix, ordinairement faible et douce, un volume de son et une énergie de vibration qui faisaient frémir les feuilles des arbres comme un souffle de tempête, tempête de sentiments et de joie dans un cœur d’adolescent, qui se communiquait par l’écho des rochers de la vallée à la nature inanimée, et qui semblait vouloir porter jusqu’à la cime des montagnes et jusqu’aux astres du firmament la nouvelle, le retentissement, l’enthousiasme de son bonheur. […] Le froid le saisit ; il rentra chancelant dans sa chambre solitaire, chercha lentement l’inspiration, tantôt dans les palpitations de son âme de citoyen, tantôt sur le clavier de son instrument d’artiste, composant tantôt l’air avant les paroles, tantôt les paroles avant l’air, et les associant tellement dans sa pensée qu’il ne pouvait savoir lui-même lequel de la note ou des vers était né le premier, et qu’il était impossible de séparer la poésie de la musique et le sentiment de l’expression.

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