Un groupe de jeunes écrivains catholiques distingués, de doctrinaires du parti, qui, à l’envi du Globe, s’étaient essayés dans le Correspondant sur la fin de la Restauration, se joignirent, sans s’y confondre, avec le groupe des amis de M. de Lamennais : à côté du vigoureux et sombre Breton, du doux, aimable et savant abbé Gerbet, du brillant et valeureux Lacordaire, du jeune comte leur ami91, alors dans toute la fraîcheur acérée de son talent, on eut Edmond de Cazalès, riche esprit, cœur plus riche encore ; Louis de Carné, esprit sage, écrivain consciencieux, s’instruisant toujours, désireux d’acquérir et de combiner tout ce qui est bien, se nuisant par là peut-être à la longue ; on eut un Franz de Champagny, jouteur sincère, peintre studieux, sévère pour les Césars comme un élève de Tacite qui eût été chrétien ; plusieurs Kergorlay, au nom jadis hostile, mais tous d’une autre génération plus adoucie, tous réconciliés entièrement ou en partie avec le siècle. […] Des renaissances d’Ordres religieux savants produisirent des travailleurs, un peu novices d’abord et aventureux, bientôt expérimentés et capables.
Car vous noterez encore que ce qui paraît un tour de force n’en est pas un pour lui : on croirait que ce style savant et dont chaque mot a sa valeur de ton est des plus travaillés, il est improvisé et facile ; il coule de source. […] Ce roman tout rétrospectif n’offre rien qui fasse froncer le sourcil aux vrais savants et aux initiés.
Nous savons, tous, par cœur les vers des Femmes savantes dans lesquels il est question de lui. […] Celle-ci étant en premier lieu pour l’importance, il demandait d’y associer les bons auteurs, les bons livres, et aussi, de plus, la fréquentation, la consultation directe des personnes savantes, capables d’éclaircir les doutes et de résoudre les difficultés.
Après tout, en parlant ainsi, c’est pour leurs goûts et leurs préférences, c’est pour leur art favori, c’est pour leur maison qu’ils plaident : « Lire les auteurs anciens, quelques centaines de volumes, en tirer des notes sur des cartes, faire un livre sur la façon dont les Romains se chaussaient, ou annoter une inscription — cela s’appelle l’érudition ; on est un savant avec cela ; on est de l’Institut, on est sérieux, on a tout : mais prenez un siècle près du nôtre, un siècle immense ; brassez une mer de documents, trente mille brochures, deux mille journaux, tirez de tout cela non une monographie, mais le tableau d’une société, vous ne serez rien qu’un aimable fureteur, un joli curieux, un gentil indiscret. […] On hésite, quand on lit ceux qui sont maîtres en ce genre excessif, à venir protester contre de si savants et parfois de si séduisants abus.