Les flots de l’Océan ont leur flux et leur reflux qui se calculent ; le sang dans nos artères et dans nos veines a un va-et-vient qui se mesure par les battements du pouls ; la fièvre comme le besoin de manger ou de dormir, revient à intervalles périodiques ; la danse, la versification, la musique nous plaisent par le retour régulier de certains sons et de certaines cadences ; les éclats de la douleur, comme ceux de la tempête, ont leurs intermittences de paroxysme et de répit ; le fleuve, qui coule intarissable, forme des courbes, qui, à moins d’obstacles entravant son cours, sont infléchies symétriquement tantôt dans un sens et tantôt dans l’autre ; la lumière et le son se propagent par ondulations qui se creusent et se renflent comme les vagues de la mer. […] Les plus violentes ruptures de tradition ne peuvent briser la chaîne qui unit aujourd’hui à hier ; par leur sang comme par leurs idées, les fils les plus rebelles tiennent encore de leurs pères.
Le lendemain des Barricades, la reine, le jeune roi et Mazarin avec la Cour une fois enfuis de Paris (janvier 1649), que va faire le coadjuteur, tribun du peuple, maître du pavé, ayant pour allié d’un côté le Parlement, cette machine peu commode à conduire, et de l’autre ceux des princes du sang et des grands du royaume (les Bouillon, les Conti, les Longueville) qui se sont engagés dans la faction avec des vues toutes personnelles ? […] Mais derrière ces premiers articles, qui sont d’affiche et de montre, arrivent les autres plus essentiels, à savoir qu’en la tendresse de l’âge du jeune roi, le parlement de Paris présentera pour le gouvernement de l’État des personnes illustres, tirées des ordres du clergé, de la noblesse et de la magistrature, qui seront, après les princes du sang, les conseillers naturels et les ministres de la régence.
Sterne, qui était faible de complexion, se rompit un vaisseau dans la poitrine, dont il cracha le sang toute sa vie. Il eut donc le charme des cracheurs de sang ; il eut le charme de la fragilité extérieure et menacée qui, d’un moment à l’autre, comme une porcelaine fêlée, peut tout à coup s’écrouler en morceaux !
Dira-t-elle que la race latine ou la germaine portent « dans le sang » le sentiment de l’égalité, comme on a dit quelquefois que la première y portait l’amour de l’unité, et la seconde celui de la liberté ? […] Mais les peuples de l’Orient diffèrent de ceux de l’Occident par bien d’autres caractères que par la forme des corps ; ils en diffèrent, par exemple, par la forme des sociétés : dès lors, qui nous dit que, encadrés en des groupements analogues, leurs membres, différents de nous par le sang, n’auraient pas été capables de comprendre les idées égalitaires ?