La foule houleuse et de belle humeur témoignait bruyamment sa satisfaction du temps et du spectacle ; elle s’enquérait du nom des célébrités et des délégations de villes et de pays qui défilaient pour son plaisir ; elle admirait les monumentales couronnes de fleurs portées sur des chars ; elle applaudissait les fifres des sociétés de tir, déchirant les oreilles de leurs airs discordants ; elle saluait de rires ironiques Déroulède et son sérieux en redingote verte ; et pour mettre le comble à sa joie, il ne manquait que le blason des Benni-bouffe-toujours du cortège, — le lapin sauté et leur arme, — la colossale seringue de carton. […] Est-ce la faute à ce pauvre homme, si pour faire fortune, le but sérieux de la vie bourgeoise, il dut mettre à son chapeau toutes ces cocardes ? […] L’Événement s’empressa, ainsi que les Débats, le Constitutionnel et le Siècle d’approuver cette « mesure si favorable à la presse sérieuse. […] D’autres hugolâtres, panégyristes maladroits, prenant au sérieux les déclarations de dévouement et de désintéressement du poète, le représentent comme un héros d’abnégation ; — ils le dépouillent de son prestige bourgeois, par simplicité. […] Mais Hugo, et c’est là son plus sérieux titre à la gloire, sut mettre en contradiction si flagrante ses actes et ses paroles, qu’il ne s’est pas encore rencontré en Europe et en Amérique un politicien pour démontrer d’une manière plus éclatante la parfaite innocuité des truculentes expressions du libéralisme.
Mais non ; il a l’air terriblement sérieux en débitant ces plaisanteries. […] L’adultère dans notre société moderne est devenu une affaire très sérieuse, ou du moins le monde comme il faut prétend n’en voir jamais que le côté sérieux. […] Non, j’entends une passion sérieuse, un amour vrai et profond. […] Non, un peu plus de sérieux, soit : car la situation est grave. […] Comme on y sentait, sous la discrétion du langage, un chagrin sérieux et profond !
Mais en ce qui est de la poésie, nous avons peine à ne pas voir plutôt un avantage dans cette espèce de langue, non pas artificielle, mais supérieure à la langue usuelle et d’un ordre plus élevé, d’un ordre à part, qu’il est permis et même imposé à tout poëte sérieux de ressaisir et de s’approprier.
Le moment était bien choisi pour se donner le plaisir d’une réaction, et l’on sait que dans tous les genres, les plus sérieux comme les plus frivoles, la France se refuse rarement ce plaisir-là.