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502. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre sixième. »

C’est ce que fit Amyot, en traduisant les écrits d’un homme supérieur qui avait recueilli tous les souvenirs de l’antiquité grecque et romaine. […] On n’avait pas d’ailleurs cessé un seul jour en France d’écrire ou de parler en latin, en sorte que depuis longtemps, par la religion, par l’usage, par ces grands traits de ressemblance avec le peuple romain, nous inclinions du côté où nous poussait le catholicisme, vainqueur de la Réforme. […] Il y a d’ailleurs de frappantes analogies entre les deux époques de grandes choses qui finissent, la religion et la société politique dans l’empire romain, le catholicisme du moyen âge, et la féodalité dans la France du xvie  siècle ; de grands bouleversements, des révolutions, le règne de la force, qui détache les esprits méditatifs d’une société où personne n’a protection, et les ramène sur eux-mêmes ; le même doute aux deux époques par des causes différentes ; dans Rome en décadence, parce que les vieilles croyances y sont éteintes et laissent l’homme en proie à lui-même ; dans la France du seizième siècle, parce qu’on est placé entre d’anciennes formes qui disparaissent et un avenir qu’on ignore.

503. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XIII] »

      C’est lorsqu’en sa douleur profonde,       Pour fermer le convoi du monde, Il scelle le cercueil de l’empire romain, Et qu’il élève alors ses accents prophétiques       À travers les débris antiques       Et la poudre du genre humain ! […] V, chap. 2] M. l’abbé Fleury, dans ses Mœurs des Chrétiens, pense que les anciens monastères sont bâtis sur le plan des maisons romaines, telles qu’elles sont décrites dans Vitruve et dans Palladio. « L’église, dit-il, qu’on trouve la première, afin que l’entrée en soit libre aux séculiers, semble tenir lieu de cette première salle que les Romains appelaient atrium : de là on passait dans une cour environnée de galeries couvertes, à qui l’on donnait le nom de péristyle ; c’est justement le cloître où l’on entre de l’église, et d’où l’on va ensuite dans les autres pièces, comme le chapitre, qui est l’exèdre des anciens ; le réfectoire, qui est le triclinium, et le jardin, qui est derrière tout le reste, comme il était aux maisons antiques. » Note M, page 115.

504. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Théocrite »

Les Romains eux-mêmes, si l’on excepte la grande Grèce, ne paraissent guère avoir été enclins à cette branche de poésie ; et lorsque Virgile l’importa chez eux, ce ne fut pas sans quelques-uns des inconvénients bien sensibles d’un genre déjà artificiel. Les vieux Romains étaient rustiques et amateurs de la campagne ; mais ils l’étaient en agriculteurs, non en bergers. […] Voilà quelle eût été tout au plus l’idylle naturelle des Romains. […] Cette admirable terminaison du chant second, qui exprime la vie des antiques Sabins, leur labeur opiniâtre durant l’année, leurs jeux aux jours de fête, jeux rudes encore et aguerrissants : Corporaque agresti nudant prœdura palaestra ; telle est la franche nature romaine primitive dans tout son contraste avec les loisirs et les passe-temps gracieux des chevriers de Sicile.

505. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIVe entretien. Littérature, philosophie, et politique de la Chine » pp. 221-315

Les Romains n’ont eu d’autre droit public que le droit du plus ambitieux et du plus armé sur le plus faible ; conquérir, spolier et posséder par la gloire, c’est toute leur politique. […] Des maîtres et des esclaves, des conquérants et des conquis, c’est tout le monde romain. […] Le christianisme qui, en promulguant le dogme d’égalité, de justice et d’amour, aurait dû changer la politique romaine a eu peu d’influence jusqu’à ces derniers temps sur les institutions sociales des peuples. […] Machiavel, le grand publiciste de l’Italie, est païen dans ses principes de gouvernement ; Montesquieu, le grand publiciste de la France au dix-huitième siècle, est romain ; Thomas Morus, en Angleterre, est chimérique : c’est un Platon britannique rêvant dans le brouillard comme son maître Platon rêvait dans la lumière du cap Sunium ; Bossuet est hébreu ; Fénelon est cosmopolite et imaginaire ; Jean-Jacques Rousseau, dans son Contrat social et dans ses plans de constitution pour la Pologne ou pour la Corse, est le plus inexpérimental des législateurs.

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