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246. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — III. (Suite et fin.) » pp. 454-472

Plus tard, dans ses loisirs occupés sous la Restauration, il fera de même : indépendamment de ses grands travaux d’histoire, de ses devoirs comme pair de France, de son assiduité aux commissions et aux sociétés dont il était membre, des rapports et discours académiques qu’on aimait à lui voir faire et dont il s’acquittait volontiers, il trouvait encore moyen de se donner des tâches surérogatoires : il écrivait en détail des remarques, des cahiers d’observations sur les ouvrages que des amis lui soumettaient ; il y a telle tragédie qu’il examinait plume en main, acte par acte, scène par scène, comme il eût fait aux premiers temps de sa jeunesse dans sa petite académie de Montpellier. […] Il n’a donc point prétendu se cantonner dans la Bretagne, la traiter au point de vue local et dans ses oppositions avec la France, mais tout au contraire faire une histoire de la Bretagne considérée dans ses rapports avec la France, la Normandie et par conséquent l’Angleterre. […] Daru, qui se trouva chargé, quelque temps après, du rapport annuel. […] Mes discours, mes rapports, mes correspondances ne me coûtaient aucune peine à écrire.

247. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — II. (Fin.) » pp. 361-379

Dans les années qui précédèrent la Révolution, la réputation de Bailly auprès des gens du monde s’entretint et s’accrut par ses rapports très bien faits et très lus sur le magnétisme animal (1784), sur l’Hôtel-Dieu (1786). Dans le rapport sur le magnétisme animal ou mesmérisme, parlant au nom d’une commission dont faisaient partie Franklin, Lavoisier, et de savants médecins de la faculté de Paris, Bailly montra toute la sagesse et la mesure de son excellent esprit, et prouva que, dès qu’il s’agissait d’un grand intérêt actuel et pratique, les hypothèses ne prenaient plus sur son imagination. […] Dans son rapport sur l’Hôtel-Dieu et sur la réforme à opérer dans les hôpitaux, il servait avec un soin et dans un détail touchants un besoin philanthropique qui était celui du temps et le sien. La reine n’avait pu lire sans être émue ce rapport, où l’on voyait le tableau circonstancié des misères humaines au sein de la capitale, ces hideux inconvénients des lits à deux, à quatre et à six malades.

248. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Des prochaines élections de l’Académie. »

L’Académie, qui dispose aujourd’hui de plus de 57,000 francs de rente, en emploie plus de 35,000 chaque année en prix et récompenses littéraires qu’elle distribue en parfaite connaissance de cause, après examen, rapport, discussion ; mais, enfin, cette idée aristocratique du rien faire et du parfait loisir pour tous ceux qui sont une fois arrivés au fauteuil, prévalut dans l’opinion et s’autorisa des prétentions mêmes, affichées par l’Académie en 1816. […] On n’a plus, j’imagine, la peau si irritable qu’autrefois : on supporte même la critique littéraire exercée publiquement par des confrères ; j’en suis la preuve vivante, et (sauf un seul cas, que je regrette) je puis certifier, à l’honneur de ceux qu’il m’est arrivé de toucher et même de combattre, que les bons rapports académiques n’en sont pas altérés. […] Après rapport et discussion, il y aurait vote au scrutin sur les trois ou quatre noms. […] J’ai fait mon Rapport au public.

249. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Connaissait-on mieux la nature humaine au XVIIe siècle après la Fronde qu’au XVIIIe avant et après 89 ? »

Mais j’aimerais assez le dialogue dans les choses littéraires, si elles étaient encore établies comme autrefois, s’il y avait, entre les journaux qui ont de la place et du loisir pour la critique désintéressée, assez de rapports de bon voisinage et assez de silence dans la rue pour que l’on pût, à certains jours, causer commodément d’une fenêtre ou d’une porte à l’autre : ainsi entre l’ancien Journal de Paris du temps de Rœderer et le Publiciste de M.  […] En fait de connaissance purement curieuse et ironique de la nature humaine, je ne sais ce que l’auteur des Lettres persanes laisse à désirer aux plus malins ; et dans l’Esprit des Lois, Montesquieu cherche à réparer, à rétablir les rapports exacts, à faire comprendre les résultats pratiques sérieux, à faire respecter les religions civilisatrices, et son explication historique des lois et des institutions, si elle ne conclut pas, inspire du moins tout lecteur dans le sens du bien, dans le désir du perfectionnement social graduel et modéré. […] Jean-Jacques Rousseau, qu’on cite toujours comme exemple de faiseur d’utopies politiques, ne s’est pas trompé lorsqu’il a tant de fois décrit, appelé de ses vœux et deviné à l’avance cette classe moyenne de plus en plus élargie, vivant dans le travail et dans l’aisance, dans des rapports de famille heureux et simples, dans des idées saines, non superstitieuses, non subversives, ce monde qui fait penser à celui de Julie de Wolmar et de ses aimables amies, et dont les riantes demeures partout répandues, dont les maisons « aux contrevents verts » peuplent les alentours de notre grande ville et nos provinces. […] Que serait-ce encore si l’on revendiquait ces autres savants d’un ordre élevé, ces moralistes implicites et d’autant plus sûrs qu’ils embrassent plus de rapports d’ensemble, ce Buffon qui se rendait d’autant mieux compte de l’homme qu’il était sorti comme naturaliste de la vue circonscrite de l’espèce, et qu’il inaugurait dans son ampleur l’étude, encore si neuve aujourd’hui, de la physiologie comparée en ce qui est des faits de sensibilité et d’intelligence !

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