/ 3286
1673. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

Voltaire peut-être a raison, et pourtant la postérité, qui n’a pas à opter entre ces chefs-d’œuvre divers ni à se décider pour l’un au détriment des autres, la postérité, qui n’est pas homme de lettres, ne se pose point la question de la sorte ; elle ne recherche pas ce qui est plus ou moins difficile ou élevé comme art, comme composition ; elle oublie les genres, elle ne voit plus que le trésor moral de sagesse, de vérité humaine, d’observation éternelle qui lui est transmis sous une forme si parlante et si vive. […] Ceux qui, sur la foi de quelques anecdotes exagérées, se font de lui une sorte de rêveur toujours absent, ont raison de n’y rien comprendre : mais c’est que l’aimable poète n’était point ce qu’ils se figurent. […] La fable qui clôt le livre VIIe, Un animal dans la Lune, nous révèle chez La Fontaine une faculté philosophique que son ingénuité première ne laisserait pas soupçonner : cet homme simple qu’on croirait crédule quand on raisonne avec lui, parce qu’il a l’air d’écouter vos raisons plutôt que de songer à vous donner les siennes, est un émule de Lucrèce et de cette élite des grands poètes qui ont pensé.

1674. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre V. Seconde partie. Des mœurs et des opinions » pp. 114-142

Cette réconciliation cesse, par une raison contraire à celle qui plaça, dans les sociétés anciennes, les mœurs et les opinions sur deux lignes différentes, et que la suite de cet écrit expliquera. […] Les révolutions qui ont pour but d’établir légalité sont antisociales, et la raison en est bien évidente : c’est qu’elles ont pour but un nouveau partage dans la propriété, et par conséquent la spoliation. […] Si nous parcourions toute la série d’idées que peut faite naître le sujet qui nous occupe, nous verrions que le duel, reste de nos anciennes mœurs, s’est conservé intact dans nos mœurs nouvelles, mais qu’il commence à sortir de la sphère des opinions ; que l’institution du jury, réclamée par nos opinions, et regardée avec raison comme le fondement de toutes nos garanties sociales et de nos libertés actuelles, n’est point entrée dans nos mœurs, puisque nous obéissons avec tant de répugnance à la loi qui nous impose le devoir de juger nos pairs, puisque les jugements rendus dans le sanctuaire de la justice, sous la responsabilité de la conscience des jurés, sont attaqués ouvertement, et discutés comme nous discutons tout ; nous verrions enfin que si nous n’étions pas soutenus par l’esprit de parti, nous nous acquitterions de nos fonctions d’électeurs avec une négligence que l’on prévoit déjà pour l’avenir.

1675. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre premier. Le problème des genres littéraires et la loi de leur évolution » pp. 1-33

En 1900 j’exposai ma théorie à Gaston Paris ; il en vit aussitôt les conséquences, et, sans me donner tort ni raison, il m’encouragea vivement à la publier. […] Ce sont là des conflits particulièrement intéressants qui confirment la loi, et s’expliquent par elle. — Dans l’évolution normale, ces trois états d’esprit se succèdent, sans jamais s’exclure complètement ; Victor Hugo le remarque expressément, avec raison, dans un des passages que j’ai cités plus haut. […] Ce genre est le plus continu des trois, pour des raisons techniques, psychologiques et sociales que je n’ai pas à développer ici ; pourtant il est moins continu qu’il ne semble au premier abord.

1676. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff » pp. 237-315

Quelle raison avez-vous de vivre comme vous vivez et de perdre votre temps ? […] Notre avocat a bien raison de dire que vous êtes un faiseur de calembours. […] Il sentait que son ami avait raison. […] Pierre, dit Boris en se plaçant en face de son ami, je dois l’avouer : vous avez raison. […] — Je n’admets pas cette raison.

/ 3286