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1780. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIIe entretien. Littérature dramatique de l’Allemagne. Le drame de Faust par Goethe » pp. 81-160

si je pouvais au moins, sur les cimes des montagnes, errer dans ta douce lumière, flotter au bord des grottes profondes avec les esprits incorporels, m’étendre sur les prés avec ton crépuscule, et, libre de toutes les angoisses de la science, me baigner, plein de vie et de santé, dans tes rosées ! […] — Je suis l’Esprit qui nie tout et toujours ; je lutte contre tout ce qui est pour le vicier ou le détruire, et je ne puis réussir : tout renaît et subsiste malgré moi. » Ceci est dit en vers d’une métaphysique aussi poétique qu’elle est profonde, mais c’est le sens. […] ce flacon : trois gouttes de ce breuvage suffiront pour que la nature s’endorme doucement en un sommeil profond.

1781. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

Il avait quitté l’avoué et le notaire chez lesquels on l’avait placé : il n’y avait gagné que les connaissances techniques de législation pratique qui lui furent utiles plus tard dans ses ouvrages, et le profond dégoût de ces occupations mercenaires que sa belle imagination dédaignait ; il commençait à penser à la gloire, premier et dernier rêve des grands cœurs. […] Bon ou mauvais, le système représentatif exige d’immenses talents, les grands écrivains seront nécessairement recherchés dans les crises politiques ; ne réunissent-ils pas à la science, l’esprit d’observation et la profonde connaissance du cœur humain ? […] Laissez cela à faire aux avocats et à préconiser aux journalistes, deux espèces de publicistes pour lesquels il ne dissimulait pas son dédain. — Le gouvernement parlementaire, disait-il avec l’ironie profonde de sa bonne foi, est le régime des sophistes ou des bavards.

1782. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

Ces hommes excellents, par le besoin que la France avait de leur génie particulier, par l’à-propos de leurs travaux, par la pénétration et la patience qu’ils y déploient, par plus d’une page où la science la plus profonde se cache sous la modestie, où la vérité ne veut être la satire de personne, sont très supérieurs aux gens dont je parlais plus haut, imitateurs superficiels des anciens et historiens avant le temps, Mézerai, Saint-Réal et Vertot. […] Cette vérité ne pouvait échapper au sens profond de Lesage ; son livre n’a peut-être pas de beauté plus élevée et plus pénétrante. […] De ce mélange de maximes empruntées aux anciens ou tirées de son fonds, s’est formé comme le miel de ce doux livre, qui a fait dire à Montesquieu parlant de Rollin : « C’est l’abeille de la France. » Mot charmant et profond, où l’on sent à la fois l’affection et le jugement, vraie saillie de cœur à propos d’un homme dont le cœur est tout le génie.

1783. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

Quelques années plus tard, quand la France se reprend d’amour pour l’azur du ciel, pour la verdure des prés, pour la mystérieuse obscurité des forêts ; quand la rêverie, ce breuvage grisant et assoupissant, enivre et endort les cœurs ; quand une mélancolie douce se complaît au murmure des sapins agités par la brise ou au clapotis des vagues expirant sur la grève ; alors aussi, par une coïncidence logique, la société française s’éprend de la fumée du tabac, des chimères de l’illuminisme et des voluptés d’une musique plus large et plus profonde. […] Plus profonde serait l’influence de la littérature sur l’architecture, s’il fallait en croire une prophétie sibylline que Victor Hugo, rapprochant la cathédrale de Paris du premier livre imprimé, a condensée dans une formule de style lapidaire : Ceci tuera cela. […] On s’est avisé en notre siècle que l’homme, n’étant pas un pur esprit, est sensible aux choses qui l’environnent, non seulement aux divers aspects de la nature, mais aux objets avec lesquels il vit tous les jours et qui par leur seule présence exercent une action profonde sur sa manière d’être et de penser.

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