Il est puéril de croire que ce qui a été pourra jamais renaître, et c’est une vanité de prétendre ressusciter une forme épuisée et morte. […] Seulement nous prétendons mettre leurs fautes à profit. […] Avec une bonne foi d’inquisiteurs, ils poussèrent au noir le tableau qu’ils prétendaient nous en donner. […] Mais pour se convaincre de tout cela il est nécessaire de vivre véritablement de la vie des individus qu’on prétend décrire. […] On prétend qu’aujourd’hui ce lien national est en train de se relâcher et que les patries agonisent.
L’Espagnol Gongora prétend savoir le bon chemin et l’indique ; Annibal Caro et les Italiens, parmi lesquels Chiabrera, en indiquent un autre ; puis des Allemands, parlant un latin gothique, veulent en suivre un troisième : on les laisse aller, ils se perdent chacun de son côté ; les Espagnols, dans des taillis de pointes épineuses ; les Italiens sur des hauteurs et des escarpements lyriques qui mènent à des précipices ; les Allemands, dans des marécages. […] Sénecé a dit quelque part un mot précieux ; c’est dans une anecdote sur Racine ; donnons-la : Racine, dit-il, ayant fait une fortune considérable à la Cour pour un homme de lettres, prétendit usurper une espèce de tyrannie sur les autres gens de son caractère, et, regardant le bel esprit comme son patrimoine, s’établit autant qu’il put dans la possession de persuader à toute la France que l’on ne pouvait en avoir sans sa permission, qu’il n’accordait, à personne. […] Chose singulière, ou plutôt chose ordinaire et assez commune aux vieillards, il prétendait n’y rien reconnaître de ce qu’il avait vu, à tel point que les mémoires de Retz (1717), en raison de deux ou trois erreurs de fait qu’il y relevait, lui semblaient un roman fabriqué par quelque homme de lettres de Hollande.
Son Discours de réception était fort attendu ; on prétendait qu’il ne savait faire que des portraits, qu’il était incapable de suite, de transitions, de liaison, de tout ce qui est nécessaire dans un morceau d’éloquence. […] Depuis que Fléchier avait inauguré ce genre de compliment et de remerciement public en 1673, vingt ans s’étaient écoulés ; le genre avait eu le temps de s’user déjà : La Bruyère se proposa pour difficulté de le renouveler, et il y réussit à tel point, il fit tant de bruit et d’éclat par la nouveauté de sa manière, qu’on a prétendu que c’est de ce jour et à cause de lui que l’Académie, toujours prudente et en garde contre l’extraordinaire, jugea à propos de soumettre préalablement le discours du récipiendaire à une commission. […] On prétendit que l’Académie avait bâillé à sa harangue.
L’Académie française, où il n’y a pas de sections, bien que l’on pût à la rigueur en concevoir (sections de langue et de grammaire, de poésie dramatique, de poésie lyrique, d’histoire, d’éloquence proprement dite, de roman, de critique littéraire, j’y reviendrai tout à l’heure), l’Académie française, loin de voir un inconvénient dans le hasard et la mêlée des candidatures, tient à honneur d’être affranchie de tout examen préalable et de tout ordre prévu et réglé en matière d’élection ; elle estime que les qualités générales qui constituent le littérateur distingué, en quelque genre que ce soit, et l’homme de goût, sont suffisamment appréciées et senties par chacun de ses membres, et que prétendre faire plus, vouloir tracer des divisions et des compartiments, ce serait apporter en cette matière délicate une rigueur dont elle n’est point susceptible, et qui en froisserait et en fausserait la finesse. […] Lacordaire qu’il devait viser, ce semble, comme il aurait pu prétendre dans l’élection précédente à succéder à M. de Tocqueville. […] Je ne crois pas qu’il y prétende.