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606. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

Quel curieux spectacle, plein de brillante et équivoque poésie ! […] Où est la poésie, dans tout cela ? […] Les nobles associés de Wilhelm au contraire n’estiment que la poésie du fait, ne cherchent la poésie que dans l’action. […] Leur philosophie est la raison de leur poésie et leur poésie la raison de leur philosophie. […] Certes, cela a sa poésie, sa beauté et sa vérité.

607. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Note »

Mais voilà, par malheur, que vous n’avez du poëte que l’admirable talent de poésie, du reste exact, calculant vos termes et vous tenant parole à vous-même. […] Après cela, ce n’est guère de cette poésie dont moi, en mon particulier, j’use ; ce n’est pas non plus la vôtre, c’est celle des générations tumultueuses, enivrées, qui n’y regardent pas de si près. L’Ombre de Napoléon projetée sur les nuages grossissants de l’horizon de l’avenir, voilà pour la réalité historique ; une inspiration orientale nous arrivant à travers les Nibelungen, et faisant pour la première fois invasion dans notre poésie, c’en est assez le caractère littéraire. Poésie de vin du Rhin, mais neuve, abondante et souvent incontestable de beauté. — M. de Chateaubriand est en plein dans son Milton. — Mais je vous ennuie de mes nouvelles : pour moi, puisque je sais que vous êtes assez bon pour y prendre intérêt, je travaille ; mais le labeur s’allonge, et j’en sortirai lentement.

608. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XV » pp. 175-187

Le goût avait déjà distribué aux arts, aux sciences, à la chaire, au barreau, à l’histoire, à la morale, à la poésie, à la scène comique, à la scène tragique, le ton, le style convenables à chacune de ces parties. […] Descartes ne fit point entrer de poésie dans sa méthode ; Corneille point de métaphysique dans son théâtre. […] On souriait avec dédain à l’idée qu’on pût se permettre de dire : qu’une poésie est bien châtiée ; qu’un souris est fin, qu’un souris est amer ; qu’un mauvais poète est un bâtard d’Apollon ; que les peintres sont des poètes muets ; que le soleil est l’époux de la nature. […] Il existait un grand nombre de lettres de Sévigné, modèles de style épistolaire ; on en avait de son cousin Bussy-Rabutin, homme de mauvais cœur, de mauvais esprit, mais d’assez bon goût ; En morale, on avait les nobles écrits de Balzac ; En métaphysique, la méthode de Descartes ; En didactique et en polémique, les Lettres provinciales ; En critique, plusieurs bons écrits de Port Royal, la critique du Cid ; En poésie, les belles odes de Malherbe, quelques ouvrages de Racan, de Segrais, de Benserade ; les chefs-d’œuvre de Corneille, Le Cid, Les Horaces, Cinna, Polyeucte, La Mort de Pompée, Le Menteur, Rodogune.

609. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Dante »

Les uns voyaient dans l’œuvre du poète florentin encore plus l’Histoire que la Poésie ; les autres y voyaient encore plus la Philosophie que l’Histoire. […] Il y eut même un de ces spécialistes qui crut faire un énorme honneur au Dante en l’appelant le saint Thomas de la poésie, et ce n’est pas le moins avisé et le moins considérable. […] car il a des couronnes à revendre, des couronnes de sainteté et d’héroïsme qui valent cent fois mieux que les couronnes de poésie. […] Quelle que soit la grandeur du maître en poésie qu’il a devant lui, le jeune homme obscur a dit avec une virilité prématurée ce qui lui semblait le vrai sur le Dante tout entier, auteur et homme, et bien loin de le mesurer avec le mètre enflammé de ceux qui en font un génie complexe et presque universel, et un double grand homme aussi auguste par la force du caractère que par la force de la pensée, le critique à ses premières armes a dédaigné ces exagérations, ces italianismes de l’enthousiasme, et il n’a vu dans l’auteur de la Divine Comédie qu’un poète à la manière des plus grands, mais, notez-le bien !

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