Mais cette vue, qui lui communiquerait de sa grandeur et l’envelopperait d’innocence, cette vue qui, du moins, serait une excuse à balbutier pour lui devant l’Histoire, on est obligé d’y renoncer dès qu’on étudie sérieusement le règne de ce malheureux prince, dont le pouvoir était construit sur la plus forte et la plus pure notion que les hommes aient eue jamais d’un roi, et qui aurait tout pu, jusqu’au dernier moment, s’il n’avait pas eu, dans le fond du cœur même, le honteux petit grain de sable qui, placé ailleurs, tua Cromwell.
Une observation qui n’a pas été assez faite, — peut-être parce qu’elle était trop facile à faire, — c’est que, placés à tant d’années déjà du xviiie siècle, nous n’avons pas encore son histoire.
Est-ce la main du parlementaire moderne (Semichon est homme de robe : il est avocat) qui s’est placée, sans le vouloir, sur les yeux de l’historien ?
Il était expédient de placer Gœthe et Diderot dans le cadre étroit d’un même volume, pour, rapprochés ainsi l’un de l’autre, les faire mieux juger et donner une idée plus exacte et plus nette de leur identité ; car, malgré les différences de pays et d’époque, de langue et d’idée, d’influence et de destin, Goethe et Diderot— pour qui creuse et pénètre au-delà — sont des esprits de nature identique… Gœthe — le dernier venu des deux — est certainement le plus grand dans l’opinion des hommes, comme Charlemagne est plus grand que Pépin ; mais c’est Diderot qui est le prédécesseur et le père, — et encore est-ce un père qui n’a pas donné tout son tempérament à son fils.