Cependant l’objet d’un Dictionnaire de synonymes françois, n’étant point de donner l’intelligence des vieux livres écrits en cette langue, mais d’indiquer l’usage des mots en usage, l’auteur n’auroit pas dû le grossir inutilement de quantité de termes surannés, & sur-tout de mots de patois, dont on peut user avec le peuple dans les pays où ils ont cours, mais qu’on ne doit jamais écrire, au moins dans un ouvrage poli. […] On n’y fait presque jamais connoître les mœurs, la religion, les loix, le commerce des peuples, ni les productions des pays qu’ils habitent, quoique toutes ces choses entrent essentiellement dans la définition de certains articles de géographie. […] “On ne peut assez admirer, dit l’Abbé Goujet, la complaisance que l’auteur a eu de s’humaniser avec le plus bas peuple, pour s’enrichir de ses façons de parler & de penser ; & d’employer ses veilles à puiser tout ce qu’il y a de plus libre dans les ouvrages qui sont réprouvés de quiconque n’a pas encore perdu toute pudeur.
Du moins si les sons par lesquels les hommes marquent leur surprise, leur joïe, leur douleur et leurs autres passions ne sont pas entierement les mêmes dans tous les païs, ils y sont si semblables que tous les peuples les entendent. […] Tous les peuples ont bien tendu au même but dans leur poësie ; mais tous n’y ont pas tendus par des routes aussi bonnes. […] Les hommes en qui la nature n’a point été redressée, les sauvages et le bas peuple se servent fréquemment durant toute leur vie de ces sons inarticulez.
On s’est persuadé qu’il n’y avoit d’autre parti à prendre, à l’égard des Auteurs Grecs & Latins, que de traduire, & l’on n’a pas fait attention que la diversité du génie des Peuples, celle des Langues, étoient des obstacles insurmontables pour une bonne Traduction.
À beaucoup d’égards, c’est celui des peuples primitifs dans la période poétique et mythologique. […] » Animal ou arbre, elle le traite tout de suite comme une personne elle veut savoir sa pensée, sa parole ; c’est là pour elle l’essentiel ; par une induction spontanée, elle l’imagine d’après elle et d’après nous ; elle l’humanise. — On retrouve cette disposition chez les peuples primitifs ; et d’autant plus forte qu’ils sont plus primitifs ; dans l’Edda, surtout dans le Mabinogion, les animaux ont aussi la parole ; un aigle, un cerf, un saumon sont de sages vieillards expérimentés qui se souviennent des événements anciens et instruisent l’homme179. […] Supposez qu’un peuple s’arrête à cette idée et rie définisse pas la mort autrement. […] Comme les peuples primitifs, ils sont enclins aux idées générales et vastes ; les linguistes nous disent que tel est le caractère des racines, et partant des conceptions premières telles qu’on les trouve dans les plus anciens documents, notamment dans le Rig-Véda.