Il accordait beaucoup plus aux autres ; il insinuait ses observations sans les imposer ; il ne fermait, la bouche à personne ; il n’arrachait point la parole comme on le fait si souvent ; il savait que « l’intérêt est l’âme de l’amour-propre », même en conversation ; que, si chacun ne pense qu’à soi et à ce qu’il va dire, il paralyse les autres ; que la meilleure manière de les ranimer et de les tirer de l’assoupissement ou de l’ennui, c’est de s’intéresser à eux et de toucher à propos les fibres qui leur sont chères. […] Parlant d’une beauté qui, dans l’habitude de la vie, avait « un certain air d’indolence et de nonchalance aristocratique, qu’on aurait pris quelquefois pour de l’ennui, quelquefois pour du dédain », M. de La Rochefoucauld n’aurait jamais ajouté, en se dessinant, et en se caressant le menton : « Je n’ai connu cet air-là qu’à une seule personne en France… » Comme si celui qui écrit cela avait connu vraiment toute la fleur des beautés de la France. […] Je voudrais obliger tout le genre humain, et surtout les honnêtes gens ; mais il n’y a presque personne à qui je voulusse avoir obligation.
J’avais eu tellement l’air de l’épouser d’abord aux yeux de certaines personnes, que je sentais bien que je nuirais plus que je ne servirais à son retour de fortune en insistant. […] Or, au moment où s’essaya Ronsard, la tradition du Moyen Âge chez nous était toute dispersée et rompue, sans qu’il eût à s’en mêler ; ces grands poèmes et chansons de geste, qui reparaissent aujourd’hui un à un dans leur vrai texte grâce à un labeur méritoire, étaient tous en manuscrit, enfouis dans les bibliothèques et complètement oubliés ; on n’aurait trouvé personne pour les déchiffrer et les lire. […] Si l’on voulait s’en prendre aux événements de ce que l’homme n’a pas su accomplir, il serait naturel de faire comme Ronsard et d’accuser les guerres civiles et domestiques ; elles lui furent plus contraires quJà personne, et dès 1562 il éprouva, pour s’être loyalement déclaré en faveur de l’ordre existant et de l’Église établie, la fureur et la malignité des factions.
On se donne souvent bien de la peine pour réveiller des choses passées, pour ressusciter d’anciens auteurs, des ouvrages que personne ne lit plus guère et auxquels on rend un éclair d’intérêt et un semblant de vie : mais quand des œuvres vraies et vives passent devant nous, à notre portée, à pleines voiles et pavillon flottant, d’un air de dire : Qu’en dites-vous ? […] Elle institue en elle des combats, bien qu’elle n’en ait l’honneur aux yeux de personne : « Ce qui l’exaspérait, c’était que son mari n’avait pas l’air de se douter de son supplice. » Elle essaye un jour de s’en ouvrir au brave curé, M. […] Un soir que Rodolphe est venu, rendre visite à Mme Bovary et qu’il s’est installé dans le cabinet aux consultations où personne n’entre à cette heure, on entend du bruit ; Emma lui dit : « As-tu tes pistolets ?
Jouvin au Figaro dansdes articles de véritable critique, reprirent et poussèrent l’attaque : George Sand, dans le Siècle, sans répondre à personne en particulier, évoqua un Béranger noble, élevé, sérieux, fier, idéalisé et encore ressemblant, plusgrand que nature, une figure d’au-delà, telle qu’elle sort de la tombe à l’heure du réveil, en dépouillant toutes les petitesses humaines et les chétives misères. […] Conçoit-on un éditeur, au contraire, qui intervient à tout propos à travers son auteur, parle en son propre nom durant des pages, exprime son opinion sur les événements et sur les personnes, prétend dicter à chacun le ton et donner la note sur ce qu’on peut juger aussi bien que lui ; qui déclare que la France, après s’être incarnéedans Napoléon, s’incarna une seconde fois dans Béranger, et que, depuis 1815 jusqu’en 1857, « la poésie de Béranger est Vessieu sur lequel tourne notre histoire : il a mû quarante ans nos destinées ! […] Je n’ai pas le courage d’imposer mes calculs à personne.