On a tâché de réunir dans ces quelques pages les principales préoccupations qui sont les facteurs du vaste problème esthétique. […] Il est dominé par des lois si sévères, si vitales aussi, que l’artiste les subit sans rien abdiquer de son indépendance, — car elles sont intransgressibles à ce point qu’elles ont choisi pour pages où s’inscrire le cœur et le cerveau mêmes de l’artiste. […] C’est la pensée qu’exprime, dans son style synthétique, mon maître, le poète Stéphane Mallarmé, par cette page qu’il a bien voulu m’adresser ici, sachant de quoi je dois vous parler. […] Ainsi de la page exquise de Stéphane Mallarmé résulterait cette formule qui dit brièvement toute la vérité et qu’il faut inscrire dans toutes les mémoires : L’ART = LA VIE.
Ravaisson dans une de ses pages les plus souvent citées : « des profondeurs de la mémoire sort aussitôt tout ce qui peut y servir des trésors qu’elle contient. […] Un jour, on plaça une feuille blanche sur la page d’écriture qu’il venait de terminer : il se relut sur cette page blanche, faisant çà et là des ratures et des corrections qui coïncidaient exactement avec le texte placé dessous. Il accomplissait ainsi son travail logique sur une image hallucinatoire, mais parfaitement exacte, de la page écrite : « il remplaçait la vue par le raisonnement. » Pour représenter par comparaison le mécanisme du raisonnement et son rôle prépondérant dans la conscience, on a cité ces fleurs que le froid dessine peu à peu sur les vitres des chambres en congelant notre haleine ; elles ont beau offrir les formes les plus variées, elles ne sont que la mise en œuvre d’une même loi.
Puis il tire d’une commode, des cahiers, où il nous montre de nombreuses pages contenant l’historique de ces évocations, et nous montre enfin un tableau, représentant une femme aux mains lumineuses, qu’il dit être venue l’embrasser, et dont il a senti sur sa joue, ses lèvres, des lèvres pareilles à des lèvres de feu. […] Dimanche 27 février Aujourd’hui Rodenbach parle ingénieusement de la page imprimée du livre, qui, avec les combinaisons des interlignes, des à la ligne, des capitales, des italiques, etc., etc., est arrivée à l’arrangement artistique et, comme il le dit, à l’orchestration de l’affiche. […] Diable, moi qui ne peux lire, chez moi, une page de ma prose à deux ou trois amis, sans un tremblement dans la voix, je l’avoue, je suis plein d’émotion, et crains que mon discours ne s’étrangle dans mon larynx, à la dixième phrase. […] * * * Eh bien, non, ça s’est passé mieux que je ne croyais, et ma voix s’est fait entendre jusqu’au bout, dans une bourrasque impétueuse qui me collait au corps ma fourrure, et me cassait sous le nez les pages de mon discours, — car l’orateur ici est un harangueur de plein air ; — mais mon émotion, au lieu de se faire aujourd’hui dans la gorge, m’était descendue dans les jambes, et j’ai éprouvé un trémolo qui m’a fait craindre de tomber, et m’a forcé à tout moment de changer de pied, comme appui.
C’étaient des pages de la Bible, c’étaient des pages d’Homère que ces journées. […] Nous savions que notre mère aimait à lire dans ces volumes d’autel pleins de prières et qui conservaient encore dans leurs pages l’odeur d’encens dont l’encensoir des enfants de chœur les avait jadis parfumés. […] Elle vous apprendra bien des choses sur les hommes et sur les pays d’autrefois. » Elle ouvrit alors le gros volume, dont les marges, rongées par les rats, laissaient bien des vides sur le bord des pages : c’était la traduction de l’Odyssée d’Homère par madame Dacier.