La maturité vint à son génie comme à son humeur, du moins une maturité relative ; dès lors le roman s’ouvrit véritablement pour lui, non pas le roman, sans doute, pris dans le milieu de l’expérience habituelle, dans le courant ordinaire des mœurs, des passions et des faiblesses, non pas le roman familier à la plupart, mais le sien, un peu fantastique toujours, anguleux, hautain, vertical pour ainsi dire, pittoresque sur tous les bords, et à la fois sagace, railleur, désabusé : Notre-Dame de Paris put naître.
Son esprit ne s’ouvre pas tout à coup, mais il se déploie petit à petit, et il gagne beaucoup à être connu.
C’était, il est vrai, un vieux poëte unique en son genre, et par mille endroits ne ressemblant à nul autre, ni à maître Vincent, ni à maître Clément, ni à maître François ; un vieux poëte, adorateur de Platon, fou de Machiavel, entêté de Boccace, qui chérissait Homère et l’Arioste, oubliait de dîner pour Tite-Live, goûtait Térence en profitant de Tabarin, qu’une ode de Malherbe transportait presque à l’égal de Peau d’Ane, et dont l’admiration vive et mobile, comme celle d’un enfant, embrassait toutes les beautés, s’ouvrait à toutes les impressions, en recevait indifféremment du nord ou du midi, et trouvait place même pour le prophète Baruch, quand Baruch il y avait199.
Poëte d’un vrai talent, doué par la nature de qualités riches et rares, amoureux de la gloire immortelle et capable de longues entreprises, il ne lui a manqué peut-être au début qu’une de ces disciplines saines, et fortes qui ouvrent les accès du grand par les côtés solides, et qui tarissent dans sa source, et sans lui laisser le temps de grossir, la veine du faux goût.