Elle a la meilleure grâce et la plus belle taille que j’aie jamais vue, habillée à peindre et coiffée de même ; des yeux très vifs et très beaux, des paupières noires et admirables, le teint fort uni, blanc et rouge, comme on peut le désirer ; les plus beaux cheveux blonds que l’on puisse voir, et en grande quantité. […] Elle a quelque chose d’une Italienne dans le visage, mais elle plaît, et je l’ai vu dans les yeux de tout le monde. […] On baissait les yeux ; à peine osait-on respirer.
Je ne réponds pas, et aucun lecteur circonspect ne saurait répondre de la vérité et de l’exactitude historique de la plupart des récits que nous offrent les Mémoires de Retz ; mais ce qui est évident et qui saute aux yeux, c’est quelque chose de supérieur pour nous à cette exactitude de détail, je veux dire la vérité morale, la fidélité humaine et vivante de l’ensemble. […] La reine, incrédule et colère, le cardinal, qui n’a point peur encore, et qui sourit malignement, les complaisants, les flatteurs du lieu, Bautru et Nogent, qui bouffonnent, et chacun des assistants dans son rôle : M. de Longueville qui témoigne de la tristesse, « et il était dans une joie sensible, parce que c’était l’homme du monde qui aimait le mieux le commencement de toutes affaires » ; M. le duc d’Orléans qui fait l’empressé et le passionné en parlant à la reine, « et je ne l’ai jamais vu siffler avec plus d’indolence qu’il siffla une demi-heure en entretenant Guerchy dans la petite chambre grise » ; le maréchal de Villeroi qui fait le gai pour faire sa cour au ministre, « et il m’avouait en particulier, les larmes aux yeux, que l’État était sur le bord du précipice ». […] » Il s’arrêtait à chaque pas, car il était fort faible et se tenait tantôt d’un côté, tantôt de l’autre ; et, jetant les yeux sur l’objet qui lui frappait la vue, il disait du profond du cœur : « Il faut quitter tout cela !
Les larmes de tendresse qui tombent de mes yeux sur ce papier en sont bien la preuve. […] Ce grand citoyen, dans le ravissement de voir enfin ses maîtres honorer le plus utile établissement de leur présence, après neuf ans d’une attente vaine et douloureuse, m’embrassa les yeux pleins de larmes, en disant tout haut : Cela suffit, cela suffit, mon enfant ; je vous aimais bien ; désormais, je vous regarderai comme mon fils : oui, je remplirai l’engagement que je viens de prendre, ou la mort m’en ôtera les moyens. […] Le courage de se rompre ainsi, m’a toujours paru un des plus nobles efforts dont un homme de sens pût se glorifier à ses yeux. » Un fait singulier et des plus minces fut l’ouverture qu’il saisit pour rentrer dans ses avantages et reconquérir, à force d’adresse et de talent, tout ce qu’il avait perdu.
Un roc sert de portique à la funèbre voûte : Sur ce fronton, Un artiste martyr dont les Anges, sans doute, Savent le nom, Peignit les traits du Christ, sa chevelure blonde, Et ses grands yeux, D’où s’échappe un rayon d’une douceur profonde Comme les cieux ! […] C’est le sentiment vif de cette incomparable et idéale agonie qui lui inspira un Dialogue entre Platon et Fénelon, où celui-ci révèle au disciple de Socrate ce qu’il lui a manqué de savoir sur les choses d’au-delà, et où il raconte, sous un voile à demi soulevé, ce que c’est qu’une mort selon Jésus Christ : Ô vous, qui avez écrit le Phédon, vous, le peintre à jamais admiré d’une immortelle agonie, que ne vous est-il donné d’être le témoin de ce que nous voyons de nos yeux, de ce que nous entendons de nos oreilles, de ce que nous saisissons de tous les sens intimes de l’âme, lorsque, par un concours de circonstances que Dieu a faites, par une complication rare de joie et de douleurs, la mort chrétienne, se révélant sous un demi jour nouveau, ressemble à ces soirées extraordinaires dont le crépuscule a des teintes inconnues et sans nom ! […] J’ai sous les yeux une jolie petite scène en vers, qu’il destinait, il y a peu de jours, aux jeunes pensionnaires du Sacré-Cœur d’Amiens, et dans laquelle il a passé comme un souffle d’Esther, mais d’une Esther égayée du voisinage de Gresset.