Les femmes de ce pays l’avaient ébloui d’abord, et, peu de jours après son arrivée, il écrivait à La Fontaine ces phrases qui donnent à penser : « Toutes les femmes y sont éclatantes, et s’y ajustent d’une façon qui est la plus naturelle du monde ; et pour ce qui est de leur personne, Color verus, corpus solidum et succi plenum ; mais comme c’est la première chose dont on m’a dit de me donner garde, je ne veux pas en parler davantage ; aussi bien ce seroit profaner la maison d’un bénéficier comme celle où je suis, que d’y faire de longs discours sur cette matière : Domus mea, domus orationis. […] Il faut donc qu’ils aient une bonté médiocre, c’est-à-dire une vertu capable de faiblesse, et qu’ils tombent dans le malheur par quelque faute qui les fasse plaindre sans les faire détester. » J’insiste sur ce point, parce que la grande innovation de Racine et sa plus incontestable originalité dramatique consistent précisément dans cette réduction des personnages héroïques à des proportions plus humaines, plus naturelles, et dans cette analyse délicate des plus secrètes nuances du sentiment et de la passion. […] Pour Néron, tout pur de sang qu’il est encore, son naturel féroce gronde depuis longtemps en son âme et n’épie que l’occasion de se déchaîner ; il a déjà essayé d’un poison lent contre Britannicus. […] A cela près, ou plutôt même à cause de l’omission, ce délicieux poëme, si parfait d’ensemble, si rempli de pudeur, de soupirs et d’onction pieuse, me semble le fruit le plus naturel qu’ait porté le génie de Racine.
Il est toujours naturel et il a toujours l’air de s’amuser de ce qu’il dit, même quand ce n’est guère amusant. […] Mais vous, vous n’êtes guère poli et je crois d’ailleurs que vous exagérez. » On m’a raconté qu’il disait un jour : « Depuis que je suis au monde, j’entends un tas de gens dire qu’ils sont agacés ; moi, je ne sais pas ce que c’est : je n’ai jamais été agacé de ma vie. » Écrivain, il a au plus haut point le naturel et la clarté, car il ne parle jamais que dès choses qu’il « conçoit » parfaitement. […] Simplicité, clarté, naturel, mouvement aisé, verve entraînante, c’est là tout son fait. […] Je n’ai fait que constater par des expériences sans nombre à quelles conditions naturelles et nécessaires est soumise l’œuvre dramatique et ce qu’elle doit être pour plaire au public, car c’est là, comme dit l’autre, la grande règle des règles.
Mais, dominé par les forces d’ensemble et d’ordre de la société, il sera incessamment combattu et vaincu dans ce qu’il a d’absurde et de pervers tout en prenant progressivement sa place et sa part dans cet immense et redoutable développement de l’humanité tout entière qui s’accomplit de nos jours. » Ce qui fait la force du socialisme, c’est qu’il correspond à une tendance parfaitement légitime de l’esprit moderne, et en ce sens il en est bien le développement naturel. […] Tout sacrifice de l’individu qui n’est pas une injustice, c’est-à-dire la spoliation d’un droit naturel, est permis pour atteindre cette fin ; car dans ce cas le sacrifice n’est pas fait à la jouissance d’un autre, il est fait à la société tout entière. […] L’inégalité est révoltante, quand on considère uniquement l’avantage personnel et égoïste que le supérieur tire de l’inférieur ; elle est naturelle et juste, si on la considère comme la loi fatale de la société, la condition au moins transitoire de sa perfection. […] Au point de vue de l’individu, la liberté, l’égalité absolues semblent de droit naturel.
Il est homme de lettres aussi, celui que le feu de son imagination porte sans cesse vers des sujets nouveaux ; qui, doué de verve et de fécondité naturelle, n’a pas plutôt fini d’une œuvre qu’il en recommence une autre ; qui se sent jeune encore pour la production à soixante ans comme à trente ; qui veut jouir tant qu’il le peut de cette noble sensation créatrice et mener la vie active de l’intelligence dans toutes les saisons. […] Ces portraits et caractères composés si savamment, mais composés et concertés, auraient pris plus de naturel et de vie ; les originaux vrais auraient apparu, se seraient développés avec ampleur et abandon, et je ne sais quel charme qui leur manque ; je le suppose toujours à l’abri du trop de facilité et de laisser-aller. […] Quand le pouvoir est un concours incessamment ouvert, il est assez naturel que les plus capables y prétendent. […] N’écrivant que sous la pression d’une idée, son style serait toujours plein, vrai, naturel.