Ne prenons pas le change sur le cadre ou sur le ton : tant d’énumérations moralisées ou satiriques que nous rencontrons, ne sont qu’une forme originale de littérature réaliste, dont le caractère essentiel est de réveiller chez l’auditeur la sensation des réalités qui lui sont prochaines : et comme cette littérature s’adresse à des imaginations vierges, non blasées encore, ni réfractaires par un trop long usage à l’action suggestive des mots, les noms soûls des choses, sans descriptions, sans épithètes, sans tout le mécanisme compliqué du style intense, les noms tout secs sont puissants : le poète se contente d’appeler, pour ainsi dire, chaque objet, aussi le voilà présent, en sa concrète et naturelle image, aux esprits de ceux qui l’entendent. […] Dans la langue vulgaire, comme dans la langue latine, le xiiie siècle est le siècle des Sommes et des Encyclopédies : les unes plus scientifiques (entendez le mot des sujets, non de la méthode), comme l’Image du monde de Gautier de Metz, ou le fameux Trésor de Brunetto Latino (1205), d’autres purement morales et religieuses, connue la Somme des vertus et des vices, dédiée à Philippe le Hardi en 1279 par le frère Lorens, d’autres où la description satirique de la vie se mêle à la morale, et prend même le dessus sur elle, comme la Bible, peu religieuse, et parfois impudente, de Guyot de Provins. […] Hier c’était au jésuite qu’il en avait : au xiiie siècle, c’était aux jacobins, aux cordeliers, en un mot aux ordres mendiants. […] Cependant d’un mot il a indiqué la nature comme « la fontaine » Toujours courante et toujours pleine De qui toute beauté dérive. […] C’est le geste, le mot, l’accent, qui caractérisent un caractère, un état d’esprit : c’est l’expressionindividuelle de l’universelle humanité, ou d’un des larges groupes qui la composent, d’une des éternelles situations dont est faite son histoire morale.
Ce mot désigne d’abord vers 1400 des représentations figurées, sans dialogue dramatique, des scènes muettes, pantomimes, tableaux vivants, dont les sujets étaient mythologiques, allégoriques ou chrétiens, et qu’on donnait aux fêtes, aux entrées de rois et de princes. […] Il va sans dire que nulle ombre d’unité, au sens classique du mot, n’existait dans de telles pièces. […] En effet elle est souvent attendrissante, et parfois pathétique : c’est vraiment ce que nous appelons le drame, avec toute la variété de tons et de dénouements que ce mot comporte, avec la variété de sujets, qui tantôt sont historiques, tantôt légendaires, tantôt de pure imagination, et tantôt d’origine religieuse. […] Le théâtre sous Charles VII, Louis XI et Charles VIII s’était risqué à dire son mot sur les affaires du temps : il en avait coûté parfois aux auteurs et aux acteurs. […] vive Bourgogne », jusqu’à ce que, menacé de toutes parts, et ne sachant où se fourrer, il lâche ce mot grandiose : « Vivent les plus forts !
De là, une science nouvelle de l’homme, qui devait découvrir et mettre en culture toutes ces terres inconnues de l’antiquité païenne, quoique peut-être soupçonnées de ses sages agrandir notre nature ou plutôt lui restituer sa grandeur, en un mot, compléter l’ordre des vérités philosophiques, et fonder tout un ordre nouveau de vérités morales. N’est-ce pas là cette science qu’Érasme a si admirablement définie la philosophie chrétienne, associant ainsi un mot païen à un mot chrétien, et confondant ensemble les deux Renaissances dont l’union seule a fait la beauté de l’esprit moderne ? […] Il faut comprendre dans ce mot la science des rapports de l’homme avec Dieu dans la religion, de l’homme avec son semblable dans la société chrétienne ; l’étude des sources mêmes de cette science, les livres saints, pénétrés par le plus subtil des docteurs, et interprétés par le plus clair des écrivains ; tant d’explications si hautes de la parole de Dieu, de ses prophètes, de la doctrine des Pères ; toute l’antiquité chrétienne rendue familière à tout le monde, dans son histoire que Calvin raconte avec un détail plein d’intérêt, dans sa morale dont il sonde la profondeur ; enfin, la suite de l’histoire de l’Église, d’après les autorités, toujours bien connues, lors même qu’elles sont interprétées faussement ; et toutes ces critiques, souvent éloquentes, toujours vives et précises, des abus de l’Église d’alors, que Calvin étale sans charité, mais qu’il sait exagérer sans déclamation. Voilà ce qui était nouveau dans la langue française, et ce qui méritera toujours qu’on l’aille chercher parmi beaucoup de subtilités et de menue théologie qui rabaissent le débat à des questions de mots.
Voici quelles sont ces hypothèses, dont j’ai déjà dit un mot. […] Convenons, comme je l’ai fait, de ne pas considérer comme distinctes les deux séries Σ et Σ + S + S′ lorsque les deux séries S et S′ seront inverses l’une de l’autre au sens donné plus haut à ce mot ; malgré cette convention, l’ensemble des séries Σ distinctes formera encore un continu physique et le nombre des dimensions sera moindre mais encore très grand. […] Or voici ce que nous constatons : au début mon doigt D′ éprouve une sensation A′ ; je fais des mouvements qui engendrent les sensations musculaires S ; mon doigt D éprouve l’impression A ; je fais des mouvements qui engendrent une série de sensations σ ; mon doigt D continue à éprouver l’impression A, puisque c’est la propriété caractéristique des séries σ ; je fais ensuite des mouvements qui engendrent la série S′ de sensations musculaires, inverse de S au sens donné plus haut à ce mot. […] Au vrai sens du mot, il est clair que nous ne pouvons nous représenter l’espace à quatre, ni l’espace à trois dimensions ; nous ne pouvons d’abord nous les représenter vides, et nous ne pouvons non plus nous représenter un objet ni dans l’espace à quatre, ni dans l’espace à trois dimensions : 1° parce que ces espaces sont l’un et l’autre infinis et que nous ne pourrions nous représenter une figure dans l’espace, c’est-à-dire la partie dans le tout, sans nous représenter le tout, et cela est impossible, puisque ce tout est infini ; 2° parce que ces espaces sont l’un et l’autre des continus mathématiques et que nous ne pouvons nous représenter que le continu physique ; 3° parce que ces espaces sont l’un et l’autre homogènes, et que les cadres où nous enfermons nos sensations, étant limités, ne peuvent être homogènes. […] À ce compte, on n’aurait pas non plus celle de l’espace, car, lui aussi, on ne peut pas se le représenter, au sens propre du mot, pour les raisons que j’ai dites.