On a chaud de toute cette bonne et grasse couleur qu’il étend sur la nature et les choses visibles ; on est tout attendri du sentiment moral qui spiritualise et poétise cette couleur d’École hollandaise appliquée sur des sujets allemands, fomentations délicieuses pour l’imagination et pour le cœur !
C’est ainsi qu’en baissant dans leur moralité les peuples baissent dans leur intelligence… Nous le disions récemment, à propos de cette immense mystification que des nigauds appellent, avec un sérieux bouffon : « la science de l’économie politique », tout pour l’homme est dans les questions morales, même le secret de son talent et de son génie quand il en a.
D’abord, un des principaux mérites d’Isocrate, était l’harmonie ; on sait combien les Grecs y étaient sensibles ; nés avec une prodigieuse délicatesse d’organes, leur âme s’ouvrait par tous les sens à des impressions vives et rapides ; la mélodie des sons excitait chez eux le même enthousiasme que la vue de la beauté ; la musique faisait partie de leurs institutions politiques et morales ; le courage même et la vertu s’inspiraient par les sons.
Si le sérieux et la grandeur manquent à leurs conceptions religieuses, si l’assiette et la durée manquent à leur établissement politique, ils sont exempts des déformations morales que la grandeur de la religion ou de l’État impose à la nature humaine. […] Auprès de leur style littéraire, tout style est emphatique, lourd, inexact et forcé ; auprès de leurs types moraux, tout type est excessif, triste et malsain ; auprès de leurs cadres poétiques et oratoires, tout cadre qui ne leur a pas été emprunté est disproportionné, mal attaché, disloqué par l’œuvre qu’il contient. […] Passons aux constructions morales. […] Encore aujourd’hui la discorde subsiste ; il y a en nous et autour de nous deux morales, deux idées de la nature et de la vie, et leur conflit incessant nous fait sentir l’aisance harmonieuse du jeune monde où les instincts naturels se déployaient intacts et droits sous une religion qui favorisait leur pousse au lieu de la réprimer. […] Toujours le modèle physique Ou moral précède l’œuvre qui le représente ; mais il le précède de peu ; il faut qu’au moment où l’œuvre se fait, il soit encore présent dans toutes les mémoires.