Un petit ménage de solitaire séquestré du monde aurait été perdu dans ces grandes salles et dans ces immenses parterres. […] On l’appelait la Jumelle, parce que sa mère l’avait mise au monde le même jour qu’un frère qui ne la quittait jamais, et qui venait habituellement avec elle faner ou moissonner pour le château.
Vrai magasin comme dit Vaugelas, d’idées raisonnables et pratiques sur la vie humaine inventaire complet de la sagesse antique personnifiée elle-même dans un homme supérieur, recueillant les traditions d’un monde qui touchait à sa fin. […] Il se promène dans le monde des pensées comme un voyageur dans une contrée historique, avec la seule curiosité pour guide, laissant à chaque endroit qu’il a quitté une réflexion triste ou ironique, une rêverie, un souvenir.
C’est les tourbillonnants ébats de la danse ; des légèretés royales : et cela se mène d’une poussée si vive, que l’on aperçoit sans arrêt, sous cette frénésie, la volonté créatrice : impétueusement, l’artiste projette loin du monde son ivresse tumultueuse, tandis que rôde aux coins du cœur, guettant la première fente, le mai dépossédé. […] Mais un seul homme a été qui vraiment fut un artiste ; Beethoven, seul de tous, a constamment et dans une entière conscience, institué au-dessus de la réalité habituelle ce monde artistique d’une réalité meilleure : il a balayé de son art les immondices et les ornements inutiles, il a connu et recréé tout le domaine, à jamais possible peut-être, de son art : il a soumis ses œuvres, sans arrêt, à une théorie, mais à une théorie lente et sérieuse, et qui nous apparaît seulement sous les œuvres qui en naquirent.
C’est vers le IVe siècle que la littérature latine acquit sa plus large expansion ; c’était une époque d’inquiétudes et de controverses ; deux grandes idées luttaient pour la conquête du monde, et quand deux idées sont en lutte, elles combattent au moyen de l’écriture. […] Il est à craindre que la littérature, devenue un art d’autant plus hardi qu’il trouve en autrui moins d’accueil, d’autant plus insolent qu’il voit diminuer ses chances de plaire, d’autant plus ésotérique qu’il sent se raréfier autour de lui l’air intellectuel, il est à craindre qu’au lieu de tendre toujours vers de nouvelles frontières la littérature ne soit destinée à se resserrer en de petites enceintes ponctuées dans le monde, comme un semis d’oasis.