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271. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

Ne sont-ce pas là, manifestement, les matériaux, épars encore, de ce qui va devenir le roman de mœurs ? […] Mais c’est sur tout avec Dancourt qu’il faut voir commencer la véritable comédie de mœurs. […] Ce qui fait la valeur de Turcaret, c’en sont les mœurs. […] Turcaret, raillés, bafoués, caricaturés avec la même âpreté satirique, copiés, comme lui, d’après le vif des mœurs contemporaines, qui courent à grands pas aux mœurs de la régence ? […] De la littérature on l’a vue passer dans les mœurs.

272. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire de la querelle des anciens et des modernes par M. Hippolyte Rigault — II » pp. 150-171

Mme Dacier, d’après Aristote fortifié et corroboré par le père Le Bossu, définissait le poème épique : « un discours en vers, inventé pour former les mœurs par des instructions déguisées sous l’allégorie d’une action générale et des plus grands personnages. […] Mœurs, caractères, il traite tout cela avec le même esprit de simplification. « Le mot de mœurs, appliqué singulièrement aux personnages du poème, n’est autre chose que les penchants habituels et les sentiments qui constituent le caractère du personnage. » Le but moral comme l’entend Mme Dacier, le but d’instruction expresse, le dessein prémédité de former les mœurs, il ne le voit pas, — pas plus dans Homère que dans Racine : Racine, dit-il, n’a pas blessé la morale dans ses tragédies ; je vois bien des gens qui les envisagent comme des poèmes favorables aux mœurs, mais ils ne font pas pour cela honneur à Racine de ne s’être proposé aucune autre fin que l’instruction.

273. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

Ce fut un bonhomme, de mœurs très simples, marguillier de sa paroisse à Rouen, dévot, très sincèrement et naïvement dévot : il occupa ses loisirs, pendant qu’il fut éloigné du théâtre de 1652 à 1659, à traduire en vers des chants d’Eglise et l’Imitation de Jésus-Christ ; plus tard, il fera encore l’Office de la Vierge. […] Il y a dans Othon d’étonnantes peintures des mœurs de cour sous l’Empire. […] Il y en a de singulièrement vraies, comme Othon, comme Pulchérie, comme Suréna : c’est là qu’il faut aller chercher le roman vrai des mœurs politiques du xviie siècle, celui qui se dégagerait des mémoires et des correspondances diplomatiques. […] Dans les dernières pièces de Corneille, cela devient un système : il combine les atrocités historiques de l’antiquité avec les mœurs politiques du jour, plus rusées que cruelles, et ainsi l’ajustement de l’intrigue aux caractères est moins exact. […] C’est donc pour nous surtout, et non selon la réalité des mœurs du temps, qu’il faut rabattre des froides horreurs de la tragédie politique.

274. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

En attaquant le clergé catholique par la science, elle le força de devenir savant ; en attaquant ses mœurs, elle les épura. […] Le premier effet s’en fit voir dans un certain adoucissement des mœurs, et un certain degré de politesse dans les écrits. […] Les sujets en sont ou empruntés à ces deux auteurs, et particulièrement à Boccace, auxquels nous ne faisons que reprendre notre bien, ou fournis par des anecdotes de mœurs contemporaines. […] Parler d’amour, même aux dames du plus haut rang, de si bas qu’on le fît, c’était le droit de tout poète, et un reste des mœurs chevaleresques. […] Les rapports qu’il saisit et qu’il exprime, à la différence de ceux que perçoit le génie et dont l’homme en général est l’objet, ne sont-ils pas plus propres à un pays particulier, à une certaine forme de société, à des mœurs locales ?

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