Ce serait là l’épigraphe la meilleure à mettre en tête des écrits de Louis XIV, et elle se trouverait en partie justifiée en le lisant. En commençant à vingt-trois ans à vouloir régner entièrement par lui-même, Louis XIV met au nombre de ses occupations essentielles et de ses devoirs, de noter par écrit ses actions principales, de s’en rendre compte, et d’en faire le sujet d’un enseignement à son fils qui, plus tard, pourra s’y former à l’art de régner. […] Il croit que le bon sens, mis à l’épreuve de la pratique et de l’expérience, est le meilleur conseiller et le plus sûr guide : et il est tenté quelquefois de tenir pour inutiles les conseils écrits, à commencer par ceux qu’il donne à son fils ; mais aussitôt il se ravise, et il estime qu’il est profitable à tout bon esprit d’être mis en garde à l’avance et prémuni contre les erreurs. […] Le jeune roi vint, et il amena, il suscita avec lui sa jeune littérature ; il mit le correctif à l’ancienne, et, sauf des infractions brillantes, il imprima à l’ensemble des productions de son temps un caractère de solidité, et finalement de moralité, qui est aussi celui qui règne dans ses propres écrits et dans l’habitude de sa pensée3. […] [1re éd.] les gens habiles et consommés, et persuadé au fond que je n’avais point été mis et conservé sur le trône avec une aussi grande passion de bien faire sans en devoir trouver les moyens.
À l’éloquence de Rousseau, devenue patricienne sous sa plume, de bourgeoise de Genève qu’elle est sous la plume de Rousseau, il joint une faculté de métaphysique qui, s’il l’eût prise à partie et développée l’eût mis bien autrement haut que Condillac. […] Il avait le même mal que cette autre ennuyée, la marquise du Deffand, de cette femme, charmante aussi, que le monde fais ait mourir d’ennui pour sa peine de l’avoir aimé, de l’avoir diverti, et d’avoir mis à son service un esprit fait pour monter plus haut ! […] lorsqu’il se met à écrire l’histoire, on trouve tout à coup en lui la froideur sublime qui est, dit-on, dans le soleil. […] Et je n’ai rien vu de plus beau, je l’avoue, que cette martingale de bon sens politique mise à l’hippogriffe de l’imagination, et qui est plus forte que l’imagination et les passions d’un homme, qui avait de l‘une comme un poète, et des autres comme un homme de parti. […] À la veille de la Révolution qui s’annonçait, il compta parmi les écrivains qui mirent leurs plumes, dévouées comme des épées, au service de la monarchie et d’une Cour qui ne savait plus se défendre.
J’ai fait, du reste, tous mes efforts pour y mettre un certain ordre et en rendre ainsi la digestion plus facile. […] Il est certain, si l’on veut se mettre au point de vue de l’esprit orthodoxe, que le rire humain est intimement lié à l’accident d’une chute ancienne, d’une dégradation physique et morale. […] L’Être qui voulut multiplier son image n’a point mis dans la bouche de l’homme les dents du lion, mais l’homme mord avec le rire ; ni dans ses yeux toute la ruse fascinatrice du serpent, mais il séduit avec les larmes. […] Essayons, puisque le comique est un élément damnable et d’origine diabolique, de mettre en face une âme absolument primitive et sortant, pour ainsi dire, des mains de la nature. […] Je ne serais pas étonné que devant cette découverte le physiologiste se fût mis à rire en pensant à sa propre supériorité.
Dès les premiers volumes, il prêta aux critiques et aux objections, l’abbé Prévost, qui avait été bénédictin et qui faisait alors un journal, parla de l’ouvrage et substitua un autre plan à celui qu’on avait adopté : il aurait voulu un choix dans les auteurs et dans les matières ; qu’on mît à l’écart les écrivains ecclésiastiques, les controversistes ; qu’on ne dît pas tout sur chacun. […] Il fallait donc que le succès de ce premier Renart, qui mit le nom si en honneur, eût été bien grand. […] Le Lion est roi et suzerain ; il doit mettre la paix entre ses barons ; il doit rendre jugement, et on en passera par là. […] Grâce à cette diversion et au parti qu’en tire Grinbert le Blaireau, les affaires de Renart se raccommodent devant l’assemblée, si bien que le Connil, le timide Lapin, ose se mettre en avant, parler à son tour en sa faveur et se porter pour sa caution avec l’Âne. […] Il en a fait ces admirables petits drames, qui vont parfois jusqu’à la grandeur : mais son talent et son génie, ç’a été surtout de s’y être mis lui-même, de n’y avoir vu qu’un cadre à parler de l’amitié, de la campagne, de la solitude, du sommeil, de tous ces charmes qu’il sentait si bien : « Amants, heureux amants, voulez-vous voyager ?