Dans les temps qui ont précédé et suivi la Terreur, sous la Constituante, sous le Directoire, sous le Consulat, il y a eu de tels hommes ; il serait curieux d’en pouvoir étudier de près quelques-uns, et dans leurs mémoires, dans leur correspondance, de pouvoir montrer ces preuves de bon conseil et de rare jugement qui les recommandaient de près, même aux adversaires, et qui les ont ensuite naturellement portés aux premiers rangs civils dans la société rétablie. […] Le duc l’engagea à coucher le tout par écrit et envoya le mémoire à son frère M. de Guise, qui le reçut ayant le pied déjà à l’étrier, et qui n’eut que le temps d’écrire au bas, après l’avoir lu : « Ces raisons sont bonnes, mais elles sont venues à tard ; il est plus périlleux de se retirer qu’il n’est de passer outre. » Le président Jeannin sent toutefois à un certain moment qu’il s’engage, lui aussi, dans une voie périlleuse ; obligé par devoir et par reconnaissance envers Henri III, il est amené par les circonstances à demeurer auprès du duc de Mayenne, même quand celui-ci est devenu le chef de la Ligue et le maître de Paris, sous le titre ambitieux et ambigu de lieutenant général de l’État royal et Couronne de France.
Nous sommes encore ici dans les temps qui précèdent la date à laquelle s’ouvrent les Mémoires de Saint-Simon. […] On fait partir Vauban incessamment, et on ne doute pas que le roi ne partît bientôt si la saison était moins retardée. » Ce Chanlay dont il est parlé, et que Dangeau, annoté par Saint-Simon, nous fait particulièrement connaître, était de ces seconds indispensables à la guerre, un officier d’état-major accompli, parfait à étudier les questions, les lieux, à dresser des instructions et des mémoires, à juger des hommes.
Cela paraît bien d’après les mémoires et le journal de Le Dieu. […] J’ai sous les yeux quelques-unes de ces traductions en vers de Bossuet, notamment celle du beau psaume mélancolique : Super flumina Babylonis ; je croirais faire injure à cette grande mémoire que d’en citer même une seule stance.
« Je ne connais aucun livre plus riche en leçons que ces Mémoires ; par eux notre regard pénètre profondément dans les recoins les plus cachés de l’époque, et Mirabeau, ce miracle, devient un être naturel ; mais le héros ne perd rien cependant de sa grandeur. […] Les bonnes gens croient que l’auteur de ces Mémoires veut leur altérer leur Mirabeau, en révélant le secret de son activité surhumaine, et en revendiquant pour d’autres personnes une part des mérites que jusqu’à présent a absorbés exclusivement le nom de Mirabeau.