Chénier en effet avait lu (ce que M. […] Il y a entrelacé beaucoup de lis d’Anyté et beaucoup de Myro ; peu de Sapho, mais ce sont des roses. […] C’est un présent que j’offre surtout à mes amis, mais tous les initiés ont part commune à cette gracieuse couronne des Muses. » Chénier avait lu d’abord cette pièce attrayante qui ouvre le recueil de Brunck, et qui est comme l’enseigne du jardin des Hespérides ; il semble s’être dit : Et moi aussi, pourquoi donc ne ressaisirais-je pas quelque chose de tout cela ? […] Qu’un jeune homme, agité d’une flamme inconnue, S’écrie aux doux tableaux de ma muse ingénue : « Ce poëte amoureux qui me connaît si bien, Quand il a peint son cœur, avait lu dans le mien. » Voilà le vœu d’André Chénier exprimé en toute occasion : joignez-y celui d’être agréable et cher aux initiés des Muses : il ne demandait pas plus, et le sort, après bien des injures cruelles, l’a enfin tardivement exaucé.
Christel prit les trois petites lettres et les mit à part sur un coin du bureau, comme pour ne pas les mêler aux autres : Quel bonjour empressé, se disait-elle, quel appel impatient et redoublé, quel gracieux chant d’avril devait-il en sortir pour celui qui les lirait ! […] Le comte Hervé était trop occupé de ce qu’il recevait pour s’apercevoir d’autre chose ; il sortit en saluant, et lorsqu’il passa devant les fenêtres, Christel vit qu’il avait déjà brisé l’un des cachets, et qu’il commençait à lire avidement ce qui semblait si pressé de l’atteindre. […] Elle avait fini par lire couramment la pensée du cachet qui se variait sans cesse avec caprice, facile blason de coquetterie encore plus que d’amour, et qui ne demande qu’à être compris. […] La petite bibliothèque de Christel possédait quelques livres favoris, venus de là-bas pour sa mère ; il leur en lisait parfois, une ode de Klopstock, quelque poëme de Matthisson, une littérature allemande déjà un peu vieillie, mais élevée et cordiale toujours.
Ne voit-on pas encore aujourd’hui l’Évangile de la Passion se lire à trois voix, le prêtre disant la partie de Jésus-Christ, un diacre parlant pour les autres personnages, un autre débitant les morceaux de pure narration ? Dans un temps où le peuple ne lisait pas, où le latin lui était devenu inintelligible, il était naturel que les clercs songeassent à dégager le sens du service divin par une figuration plus expressive, à instruire les esprits des fidèles, en saisissant leurs imaginations : ils réalisèrent par des interpolations de plus en plus considérables et dramatiques les actes dont l’office du jour était la commémoration. […] Et d’autre part, si l’on voulait savoir à quelle exaspération de folie mystique la confiance en l’intercession de la Vierge pouvait s’égarer, on n’aurait qu’à lire le Miracle de la femme que Notre-Dame garda d’être arse : c’est l’un des plus intéressants de la série. […] Pour cette rareté dans l’époque qui nous occupe, pour un peu de fine sensibilité, l’« histoire de Griselidis » est à lire.
Qu’on lise, si l’on peut, sa Didon : le quatrième livre de l’Enéide y est fort intelligemment mis en scène. […] Bien au contraire, à qui lira attentivement les tragédies de Hardy, ou la Mélite de Corneille, il apparaîtra que le drame français tendait à se concentrer, et que, laissé à lui-même, il se fût, un peu plus tard peut-être, mais un jour certainement, régularisé. […] Il suffit de lire la Pratique du théâtre pour s’apercevoir que D’Aubignac bataille contre une forme de drame qui est celle des mystères, et pour comprendre que, dans les règles aristotéliciennes, le rationalisme classique a trouvé un moyen d’éliminer de la scène les derniers vestiges de la fantaisie jadis naïve du moyen âge. […] Lire : parmi les tragédies de Hardy, Didon, la Mort de Daire, la Mort d’Alexandre, Marianne, parmi les tragi-comédies, Gesippe, Phraarte, Frégonde.