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611. (1857) Cours familier de littérature. IV « XIXe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset (suite) » pp. 1-80

La langue de la mansarde qui est une langue aussi, n’a rien de plus délicat et de plus svelte. […] La langue de ton peuple, ô Grèce ! […] Les parchemins sacrés pourriront dans les livres ; Les marbres tomberont comme des hommes ivres, Et la langue d’un peuple avec lui s’éteindra. […] Il y a plus, elles sont neuves dans notre langue. […] Je l’ai regardé, il m’a regardé, et nous ne nous sommes rien dit, comme si nous étions deux étrangers parlant des langues diverses et n’ayant de commun que l’air qu’ils respirent.

612. (1903) La renaissance classique pp. -

Ils se sont imaginé reculer à l’infini les bornes de la langue, créer tout un nouveau mode d’expression à la fois plus subtil et plus abondant. […] Que serait-ce si l’on essayait, avec cette langue et ce style, d’exprimer des idées abstraites ? Nous mettons bien au défi de traduire avec la langue des Goncourt la plus humble des formules scientifiques ou philosophiques. […] La qualité des mots, les ressources du vocabulaire, tout l’appareil de la langue et du style, ils s’en sont occupés avec un soin minutieux. […] De toute cette encombrante abondance, nous ne retiendrons que ce qui peut entrer dans le rythme de la langue et de la tradition.

613. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — II. (Fin.) » pp. 495-513

Elle sent d’ailleurs très bien le faible de cette génération à laquelle elle s’adresse, génération de cafés et d’Opéra, qui s’en tient à une première connaissance superficielle et va ensuite porter ses découvertes dans les belles compagnies pour s’y faire applaudir : Mais par quelle fatalité, s’écriait-elle, faut-il que ce soit de l’Académie française, de ce corps si célèbre qui doit être le rempart de la langue, des lettres et du bon goût, que sont sorties depuis cinquante ans toutes les méchantes critiques qu’on a faites contre Homère ! […] Méconnaissant dans Homère, ou plutôt n’estimant point cette langue si abondante et si riche, qui est comme voisine de l’invention et encore toute vivante de la sensation même, il préférait nettement la nôtre : « J’oserai le dire à l’avantage de notre langue, je la regarde comme un tamis merveilleux qui laisse passer tout ce que les anciens ont de bon, et qui arrête tout ce qu’ils ont de mauvais. » Enfin, s’emparant d’un mot de Caton l’Ancien pour le compléter et le perfectionner à notre usage, il concluait en ces termes : Caton le Censeur connaissait parfaitement l’esprit général des Grecs, et combien ils donnaient au son des mots, lorsqu’il disait que la parole sortait aux Grecs des lèvres, et aux Romains du cœur ; à quoi j’ajouterais, pour achever le parallèle, qu’aux vrais modernes elle sort du fond de l’esprit et de la raison. […] Sa femme passait pour en savoir plus que lui en ces deux langues, en antiquités, en critique, et a laissé quantité d’ouvrages fort estimés.

614. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Sénecé ou un poète agréable. » pp. 280-297

Quand je dis que Sénecé ne porte pas dans son talent ni dans son esprit la marque précise et le cachet du siècle de Louis XIV, je désire bien faire entendre en quoi cela est vrai ; car il a de ce siècle la politesse, l’élégance facile et une langue pure ; mais il n’en a pas le procédé de composition, ni les jugements ni certaines qualités non moins essentielles que la pureté et l’élégance. […] Ces épigrammes, qui plaisent tant aux connaisseurs et sont exquises aux délicats, ne semblent souvent presque rien à les traduire ; quelques-unes seulement ont une beauté qui subsiste ou qui se laisse deviner d’une langue 293 à l’autre. […] Dans les langues modernes, où le tour est moins marqué, où la langue en elle-même n’a pas à peu de frais, comme chez les anciens, sa grâce, sa cadence, et où les mots ont moins d’énergie et de jeu, il faut, en terminant, ce qu’on appelle le trait et la pointe.

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