Ce mot, La Harpe la jugé sévère contre l’auteur de tant de lettres charmantes, et à ce sujet il a mis en avant que le goût qui juge est différent de celui qui crée, distinction juste et dont La Harpe est un exemple lui-même, car il a beaucoup et bien jugé, et son goût stérile n’a rien produit ; mais il ne faut pas conclure de ce que le goût qui juge ne prouve pas celui créé, que le goût qui crée ne comprend pas celui qui juge, car le goût qui juge bien de ce qui doit entrer dans ses compositions juge nécessairement bien le choix des autres ; de sorte qu’il est absurde de dire que madame de Sévigné, douée du goût qui crée, pouvait bien être privée du goût qui juge. […] Elle a jugé comme la postérité, tous les hommes de son siècle.
Toutefois, puisque celui-ci avait une évolution à fermer, le démiurge jugea indispensable de lui infliger une légère inquiétude. […] Ils ne savent jamais être eux-mêmes sincèrement, tranquillement, ignorer en toute innocence que des gens se sont permis de formuler des règles morales universelles. » Je n’aurai pas la cruauté de juger après sa chute un esprit dont j’aimai le départ hésitant. […] Delfour cesse de conter ou de sermonner et essaie de juger comme un critique qui ne serait ni un simple informateur, ni un catéchiste.
Son honneur à lui, c’est de n’avoir jamais, même aux moments les plus désespérés et les plus amers, cédé d’un point sur les conditions qu’il jugeait essentielles au rétablissement de la monarchie en France : « Il est aussi impossible de refaire l’Ancien Régime, pensait-il, que de bâtir Saint-Pierre de Rome avec la poussière des chemins. » Consulté de Vérone par Louis XVIII, et d’Édimbourg par le comte d’Artois, dans leurs projets excentriques de restauration, il ne cesse de leur redire : « Il faut écouter l’intérieur si l’on veut entreprendre quelque chose de solide… Ce n’est pas à nous à diriger l’intérieur, c’est lui qui doit nous diriger. » Dans une note écrite pour Louis XVIII en juillet 1795, Mallet du Pan lui pose les vrais termes de la question, que ce roi ne paraissait pas comprendre entièrement alors, et qu’il fallut une plus longue adversité pour lui expliquer et lui démontrer : La grande pluralité des Français ayant participé à la Révolution par des erreurs de conduite ou par des erreurs d’opinion, écrivait Mallet, il n’est que trop vrai qu’elle ne se rendra jamais à discrétion à l’ancienne autorité et à ses dépositaires ; il suffit de descendre dans le cœur humain pour se convaincre de cette vérité. […] Il a dit ailleurs un mot terrible et qui nous jugerait bien sévèrement. […] Il apprécie aussitôt la grandeur du rôle de Bonaparte, et signale dans le fait du 18 Brumaire une métamorphose inconnue : « Attendons la moisson, disait-il, pour juger de la semence. » Il n’eut que le temps d’embrasser d’un coup d’œil son nouvel horizon de combat.
Écrivant à Henri IV son mari en octobre 1594, elle lui disait en plaisantant que, s’il avait vu la place et la façon dont elle s’y gardait, il jugerait bien que c’était à faire à Dieu seul d’entreprendre de la réduire, et qu’elle avait bien raison de croire que « cet ermitage avait été miraculeusement bâti pour lui être une Arche de salut ». […] Marguerite témoigne désirer que, puisqu’elle doit être interrogée, ce soit de personnes plus privées et plus familières, son courage n’allant pas jusqu’à pouvoir supporter si publiquement une telle diminution : « Et craindrais que mes larmes, dit-elle, ne fissent juger à ces cardinaux quelque force ou quelque contrainte, qui nuirait à l’effet que le roi désire. » (21 octobre 1599.) […] Bazin), me semble avoir très bien jugé de ce point en particulier : si leur mariage avait été des moins nobles et moins que bourgeois, « leur divorce fut royal ».