Placez le tout dans une contrée où les rivières aient l’obligeance de ne jamais noyer les désespérés qui s’y jettent, où les gens de guerre épargnent toujours les amants infortunés qui veulent se faire tuer. […] » En revanche, après des années où les forces vives de la nation ont été détournées vers d’autres activités, comme ce fut le cas dans l’orgie militaire du premier Empire, il semble qu’un chemin de velours s’ouvre aux débutants : « Michelet raconte63 que, quand il sortit du collège, les libraires se jetaient sur le moindre écolier pour en faire un homme de lettres. […] En effet, ils se jettent sur les grands sujets qu’un La Bruyère, avec un soupir de regret, déclarait interdits à un homme né chrétien et français.
Donc le vendredi 23 juillet, là-bas, en Bavière, sur cette colline, sur cette large terrasse sablée où le théâtre dresse sa modeste façade de briques et de bois, le Tout-Wagner parisien, le Tout-Wagner de Londres, de Vienne, d’Italie, du monde entier se sont jetés, avec émotion, dans les bras les uns des autres. […] L’héroïque loyauté de Tristan, chargé d’amener la princesse Iseult au vieux roi Marke, et qui, sentant gronder en son cœur une ardente passion, se tient loin d’elle, à l’arrière du navire, et se refuse à l’aborder quand elle l’envoie quérir ; — la colère et le dépit d’Iseult, confuse de l’invincible amour qui la pousse vers le chevalier qui a tué son premier fiancé, Morold ; irritée de ne rencontrer que muette indifférence en cet orgueilleux vainqueur et résolue à l’empoisonner pour venger Morold ; — à côté d’eux, le dévouement complet, absolu, représenté par l’écuyer Kurwenal et l’aimable Brangœne ; — les sages conseils de ceux-ci, tantôt ironiques, tantôt affectueux ; la réserve obstinée de Tristan, la passion croissante d’Iseult et sa soif de vengeance ; l’irrésistible élan qui les jette dans les bras l’un de l’autre après qu’ils ont bu le philtre amoureux, servi par Brangœne, au lieu du breuvage de mort qu’Iseult croyait verser à Tristan ; — leur enivrante extase et leur douloureux réveil lorsque le navire aborde et que les cris des matelots saluent le roi Marke attendant sa fiancée au rivage : — voilà pour les épisodes du premier acte, que l’auteur a traduits avec une vérité et une variété dont on ne peut avoir aucune idée, à moins de l’entendre. […] Remarquez le rôle du Motif de réminiscence, confié à plusieurs thèmes, surtout au motif en ré bémol des harpes qui ouvre la célébré ouverture, et qui réapparaît, comme thème caractéristique — Andantino religioso — du pasteur Struensée, entre autres dans le premier Mélodrame, dans le Rêve de Struensée, et au dernier moment, pendant que le pasteur bénit son fils et qu’ils se jettent silencieusement dans les bras l’un de l’autre.
Cet homme, cet enfant qui se jette à genoux Pour être, ô bienheureux défunts ! […] Car je suis l’exilé de ma cité : le seuil Des palais de mon rêve à mon terrestre orgueil Jeta le dernier anathème ; Je suis l’Aveugle-Roi de mon propre Destin, Le quêteur de l’énigme humaine, le lointain Et sombre ancêtre de moi-même. […] — Je vivrai désormais près de vous, contre vous, Laissant l’herbe couvrir mes mains et mes genoux, Et me vêtir ainsi qu’une fontaine en marbre ; Mon âme s’emplira de guêpes comme un arbre, D’échos comme une grotte et d’azur comme l’eau ; Je sentirai sur moi l’ombre de vos bouleaux ; Et quand le jour viendra d’aller dans votre terre, Se mêler au fécond et végétal mystère, Faites que mon cœur soit une baie d’alisier, Un grain de genièvre, une rose au rosier, Une grappe à la vigne, une épine à la ronce, Une corolle ouverte où l’abeille s’enfonce… » Elle vaincra l’inquiétude du néant : Ô Mort de t’avoir crainte un jour, je me repens… Lance-moi ton lacet, des flèches et ton sable Et que je jette en toi la douleur et l’ardeur De ma raison malade et de mon mauvais cœur… car, malgré tout son désir, la joie demeure insaisissable et le plaisir amer.
À la suite des maîtres une foule d’écrivains, nés avec des talents divers, se jetèrent dans l’histoire de la littérature, séduits par l’espoir d’un succès facile et par la possibilité d’un éditeur. […] Platon, dans plusieurs de ses dialogues12, avait rattaché l’idée de la beauté et celle de l’art aux principes élevés de sa philosophie, et jeté ainsi, en face de l’école empirique et réaliste d’Aristote, les bases d’une théorie rationnelle et idéaliste13. […] Que le rire ne vienne pas se jeter en étourdi à la traverse de l’attendrissement.