Je résolus donc, autant que je pourrais, de continuer à lui donner tous les conseils dont je pourrais m’aviser pour son bien, mais de ne jamais m’opiniâtrer jusqu’à le fâcher comme ci-devant, quand il ne les suivrait pas ; de lui ouvrir les yeux sur ses vrais intérêts, chaque fois que l’occasion s’en présenterait, et le reste du temps de me renfermer dans un très-morne silence ; de ménager, d’un autre côté, dans le public, mes intérêts, de telle façon que celui-ci vît en moi le sauveur de la chose publique dans l’occasion. » Le grand chancelier Bestoucheff, à la veille d’une chute et d’une entière disgrâce, s’inquiétait également de l’avenir, comme si de rien n’était, et il avait préparé un plan en prévision du décès de l’Impératrice : d’après ce projet, le grand-duc eut été proclamé comme de droit empereur ; mais en même temps, la grande-duchesse eût été déclarée avec lui « participante à l’administration. […] Si j’avais compris, dès le commencement, qu’aimer un mari qui n’était pas aimable, ni ne se donnait aucune peine pour l’être, était une chose difficile, sinon impossible, au moins lui avais-je, et à ses intérêts, voué l’attachement le plus sincère qu’un ami, et même un serviteur, peut vouer à son ami et son maître ; mes conseils avaient toujours été les meilleurs dont j’avais pu m’aviser pour son bien ; s’il ne les suivait pas, ce n’était pas ma faute, mais celle de son jugement qui n’était ni sain ni juste.
Tous les objets se présentent un à un aux regards d’Homère ; il ne choisit pas toujours avec sévérité, mais il peint toujours avec intérêt. […] Quelques courtisanes sans pudeur, des esclaves que leur sort avilissait, et des femmes inconnues au veste du monde, renfermées dans leurs maisons, étrangères aux intérêts de leurs époux, élevées de manière à ne comprendre aucune idée, aucun sentiment, voilà tout ce que les Grecs connaissaient des liens de l’amour. […] Néanmoins les Athéniens aimaient et cultivaient les beaux-arts, et ne se renfermaient point dans les intérêts politiques de leur pays ; ils voulaient conserver leur premier rang de nation éclairée ; la haine, le mépris pour les Barbares, fortifiaient en eux le goût des arts et des belles-lettres.
L’habitude, la nécessité, l’accommodation volontaire ou forcée font leur effet ; à la fin, seigneurs, vilains, serfs et bourgeois, adaptés à leur condition, reliés par un intérêt commun, font ensemble une société, un véritable corps. […] Cependant toutes les choses utiles exécutées par son ordre ou développées sous son patronage, routes, ports, canaux, asiles, universités, académies, établissements de piété, de refuge, d’éducation, de science, d’industrie et de commerce, portent sa marque et le proclament bienfaiteur public. — De tels services appellent une récompense proportionnée : on admet que, de père en fils, il contracte mariage avec la France, qu’elle n’agit que par lui, qu’il n’agit que pour elle, et tous les souvenirs anciens, tous les intérêts présents viennent autoriser cette union. […] Mon peuple n’est qu’un avec moi ; les droits et les intérêts de la nation, dont on ose faire un corps séparé du monarque, sont nécessairement unis avec les miens et ne reposent qu’entre mes mains ».
Je l’entends, cette voix forte & puissante, qui, comme un tonnerre qui roule dans la nue réveille les esprits les plus engourdis ; non ce n’est plus un homme, c’est un Dieu tutelaire qui s’est chargé des intérêts de la patrie, & qui défend la cause honorable de l’humanité ; d’une main il foudroye le vice, de l’autre il dresse des Autels à la vertu, déploye toute l’indignation d’une ame sensible contre d’injustes Tyrans, il rejette le cri insensé de l’opinion pour faire parler la voix immortelle de la raison. […] Où est son intérêt ? […] L’héroïsme a été le partage des plus vastes génies, jamais l’intérêt n’a souillé leur plume, jamais la crainte n’a fait pâlir leur front ; jamais le remord n’a succédé aux accens de leur voix libre.