Dans l’épopée, l’humanité prend pleine possession de la poésie, qui n’appartenait qu’aux dieux. […] Les divers âges de l’humanité et de chaque nation sont signalés par le développement plus particulier de l’un des arts. […] Les Grecs, les premiers, ont pratiqué dans leurs mœurs et dans leur politique la vertu qui porte le nom de cette humanité qu’ils déifiaient. […] Si l’on nous demande dans lesquels l’humanité nous a paru plus belle, plus noble, plus digne d’amour, nous ne saurions hésiter. […] Il en fut ainsi non seulement dans l’époque héroïque de l’humanité en général, mais dans l’âge héroïque de chaque civilisation, de chaque nation.
En ne considérant même ce pèlerinage que dans le sens philosophique, n’a-t-on pas quelques réflexions satisfaisantes à faire dans un lieu où la faible et souffrante humanité vient chercher des secours contre les maux de l’âme, un lieu que les consciences effrayées regardent comme un port assuré contre les orages qui les tourmentent, où l’infortuné dévoré de scrupules trouve contre des remords, peut-être imaginaires et factices, des remèdes sûrs, et par cela même précieux ?… Plaignons les faiblesses de l’humanité, et respectons les moindres de ses espérances ; n’en arrachons aucune à l’âme crédule et timide : elle mérite plus que toute autre l’indulgence du philosophe et les tendres soins des âmes fortes. […] N’est-ce pas celle qui garantit à une portion malheureuse de l’humanité les soins les plus prévenants, la condescendance la plus attentive, en un mot, ce tendre intérêt si supérieur à la simple compassion ? […] Que l’humanité soit conduite à la conquête de la terre par la colonne de nuages ou par la colonne de feu, elle marche : bénissons la Cause directrice qui assortit les moyens à l’état de nos sociétés, et que notre courte sagesse s’incline devant la Sagesse profonde qui dirige au même but ce que nous appelons l’erreur et ce que nous appelons la vérité !
La plus haute conscience de Dieu qui ait existé au sein de l’humanité a été celle de Jésus. […] Il n’a pas été donné jusqu’ici à l’égarement d’esprit d’agir d’une façon sérieuse sur la marche de l’humanité. […] C’est le Dieu de l’humanité. […] Par là, nous sommes tous ses disciples et ses continuateurs ; par là, il a posé une pierre éternelle, fondement de la vraie religion, et, si la religion est la chose essentielle de l’humanité, par là il a mérité le rang divin qu’on lui a décerné.
Le pessimisme et la misanthropie romantiques, si nobles chez la plupart des grands hommes de 1830, sont devenus chez lui une passion chagrine de dénigrement systématique, une passion d’horreur à l’endroit de l’humanité, qui a quelque chose de haineux, d’entêté, d’étroit, de sombre et de triste comme une manie, et qui en vérité chez Zola n’est qu’une manie d’aveugle ou de myope. […] Il définit l’œuvre de Zola « une épopée pessimiste de l’animalité humaine », et c’était bien marquer avec douceur la limite au-dessus de laquelle Zola ne pouvait pas s’élever et dénoncer avec discrétion la prétention injustifiée d’un auteur qui prétendait bien écrire l’épopée de l’humanité elle-même. […] Il était devenu optimiste autant que Renan écrivant l’Avenir de la science ; il croyait au progrès, aux puissances de l’humanité pour devenir meilleure ou plus heureuse. 1848 renaissait en lui et Flaubert n’eût pas reconnu le Zola qu’il avait pratiqué. Il se construisit, pour soutenir et étayer ses nouvelles tendances, une philosophie très sommaire, faite de croyance en la science considérée comme devant renouveler l’essence morale de l’humanité et devant mener le genre humain à la moralité et au bonheur.