Les achats de ces derniers sont une conséquence de leur manie des grandeurs : ils font de grandes acquisitions, parce qu’ils se croient millionnaires ou milliardaires. […] Il s’était cru, avec une satisfaction de lui-même touchant presque à la folie des grandeurs, le premier peuple du monde, et il se vit soudain humilié et écrasé. […] Le catholique en proie à la folie des grandeurs se tient pour le pape, le juif pour le Messie, l’Allemand pour l’empereur ou un feld-maréchal, le Français pour le président de la République. […] Ces siècles à la fois illustrés par la puissance des empereurs universels de la maison de Hohenstaufen, la magnificence de la poésie amoureuse de cour et la grandeur des églises gothiques, devaient nécessairement attirer les esprits sortant violemment et avec dégoût d’un présent intellectuellement prosaïque, politiquement humiliant. […] Ce qui les enchanta, en pensant au moyen âge, ce ne fut pas la grandeur et la puissance de l’empire allemand, l’abondance et la beauté de la vie allemande de ce temps-là, mais le catholicisme avec sa foi aux miracles et son culte des saints.
Ainsi, quand nos Grammairiens disent qu’un nom est à l’ablatif, ils ne le disent que par analogie à la Langue latine ; je veux dire, par l’habitude qu’ils ont prise dans leur jeunesse à mettre du françois en latin, & à chercher en quel cas Latin ils mettront un tel mot François : par exemple, si l’on vouloit rendre en latin ces deux phrases, la grandeur de Paris, & je viens de Paris, de Paris seroit exprimé par le génitif dans la premiere phrase ; au lieu qu’il seroit mis à l’ablatif dans la seconde. […] Dans la phrase françoise la grandeur de Paris, Paris ne change point de terminaison ; mais Paris est lié à grandeur par la préposition de, & ces deux mots ensemble déterminent grandeur ; c’est-à-dire, qu’ils font connoître de quelle grandeur particuliere on veut parler : c’est de la grandeur de Paris.
Est-ce ailleurs que dans le cœur humain que l’auteur de Cinna avait puisé cette admirable peinture de la colère et de la vengeance, qui luttent dans le cœur d’Auguste contre la générosité et la grandeur d’âme ? […] Bajazet, avec moins de fureur, d’étalage et de fracas, montre bien plus de véritable grandeur ; il ne veut pas devoir le trône et la vie à un lâche mensonge. […] Le roi de Pont n’est pas colossal comme les Romains de Corneille, il est de grandeur naturelle ; il a des vices et n’a point de vertus ; mais il possède ces qualités brillantes et dangereuses qu’on est convenu de prendre pour des vertus, dans le monde et surtout au théâtre. […] Ce ne sont point des conjectures, mais des effets : répondre à de sages réflexions par un persiflage d’étourdi, ce n’est pas un trait de grandeur ni d’héroïsme. […] Sa vertu forme un contraste admirable avec la scélératesse d’Aman : c’est là qu’on voit la distance infinie qui sépare la véritable grandeur de l’âme et des sentiments, de la grandeur factice et apparente du rang et des dignités.
Ils brûlaient du désir d’être aussi grands que lui, sans prendre assez garde que la commune mesure est incertaine et fuyante entre l’œuvre d’un chef d’armée et d’État et celle d’un écrivain, et que les « grandeurs de chair » ont trop d’avantages, aux yeux grossiers de la foule, sur les grandeurs spirituelles, surtout quand l’esprit n’est pas absent de ces « grandeurs de chair » elles-mêmes. […] Seule, une épopée pouvait lutter contre la grandeur de Napoléon. […] Sa grandeur n’est venue que des forces immenses que nous lui remîmes entre les mains lors de son élévation. […] S’il avait eu dans sa vie des déceptions, il les tournait en victoires, ou il les expliquait par sa grandeur d’âme. […] Et il était si heureux de les trouver, et de les entasser, et d’en trouver encore, que cela lui devenait égal de paraître attribuer à son ennemi, tout en le maudissant, une grandeur surnaturelle.