Toute la fortune de mon aïeul ne dépassait pas cinq mille livres de rente, dont l’aîné de ses fils emportait les deux tiers, trois mille trois cents livres ; restait mille six cent soixante-six livres pour les trois cadets, sur laquelle somme l’aîné prélevait encore le préciput » Cette fortune qui s’émiette et s’anéantit, ils ne savent ni ne veulent la refaire par le négoce, l’industrie ou l’administration : ce serait déroger. « Hauts et puissants seigneurs d’un colombier, d’une crapaudière et d’une garenne », plus la substance leur manque, plus ils s’attachent au nom Joignez à cela le séjour d’hiver à la ville, la représentation, les dépenses que comportent la vanité et le besoin de société, les visites chez le gouverneur et l’intendant : il faut être Allemand ou Anglais pour passer les mois tristes et pluvieux dans son castel ou dans sa ferme, seul, en compagnie de rustres, au risque de devenir aussi emprunté et aussi hétéroclite qu’eux66. […] Seigneurs qui ne résident pas. — Énormité de leurs fortunes et de leurs droits. — Ayant des avantages plus grands, ils doivent de plus grands services […] Quand, sur les biens des émigrés, il fallut payer leurs créanciers, il fut avéré que la plupart des grandes fortunes étaient vermoulues d’hypothèques93. […] Bocher : « D’après l’état dressé par ordre de la Convention, la fortune du duc d’Orléans se composait de soixante-quatorze millions de dettes et de cent quatorze d’actif. » Le 8 janvier 1792, il avait abandonné à ses créanciers trente-huit millions de ses biens pour se libérer.
Son goût pour l’étude se développa ; il pressa son grand-père d’obtenir qu’on le mît au collège, et il arracha enfin le consentement de son père, qui le mit dans une pension, et l’envoya externe aux jésuites, avec la répugnance d’un bourgeois qui croyait la fortune de son fils perdue, s’il étudiait. […] L’Huillier, homme de fortune, prenait un soin singulier de l’éducation du jeune Chapelle, son fils naturel ; et pour lui donner de l’émulation, il faisait étudier avec lui le jeune Bernier, dont les parents étaient mal à leur aise. […] La fortune qu’il fit par le succès de ses ouvrages le mit en état de n’avoir rien de plus à souhaiter : ce qu’il retirait du théâtre, avec ce qu’il avait placé, allait à trente mille livres de rente ; somme qui, en ce temps-là, faisait presque le double de la valeur réelle de pareille somme d’aujourd’hui. […] Molière, heureux par ses succès et par ses protecteurs, par ses amis et par sa fortune, ne le fut pas dans sa maison. […] Triste exemple de l’instabilité des fortunes de cour.
La fortune de ses œuvres a été du genre de son talent, éminemment aristocratique. […] Mais ce ne fut pas la fortune qui lui apparut d’abord, ce fut la gloire. […] Napoléon enfant rencontre dans la campagne une vieille Égyptienne qui lui prédit les miracles de sa fortune. […] Les lecteurs difficiles, que je cite, se plaignaient, au contraire, de cette prodigalité de bonheur, de fortune, d’amour, qui tombe sur la tête du jeune homme ruiné, du haut d’un ciel romanesque et invraisemblable. […] Cette fidélité de la fortune littéraire, la plus changeante, la plus perfide en apparence, n’est pas un effet sans cause.
Ces formes, qui, depuis la déclaration des droits jusqu’au programme de l’Hôtel de Ville, roulent dans un cercle déterminé d’idées et d’expressions, ne semblent plus avoir chance de vie et de fortune sociale dans ces mêmes termes. […] « Cependant sa fortune ne l’abandonnait pas. […] Le duc de Laval, parlant de M. de La Fayette et de ses bonnes fortunes dans sa jeunesse, disait en bégayant et de l’air le plus sérieux : « M. de La Fayette a eu madame de Simiane ; et madame de Simiane ! […] Il s’était fait de 28 à 30, 000 livres de bénéfices, grosse fortune pour le temps. […] La plupart des femmes d’émigrés avaient, en 1793, rempli la formalité d’un divorce simulé, pour mettre à l’abri une portion de leur fortune.