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1103. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Croce au contraire nous fait assister à une danse de feux follets ; puisque un seul et même homme n’est qu’une série de créations distinctes, nous n’avons plus que des individualités éphémères, et, pour être logiques, nous ne devrions plus chercher aucun rapport entre le Dante de la Vita nuova et celui de la Divina Commedia. — Mais pourquoi ne pas combiner, avec toutes les réserves que la prudence exige, l’analyse et la synthèse, en distinguant d’une part les éléments communs et d’autre part les combinaisons individuelles ? […] Cambray-Digny n’a jamais pu supporter les feux de la rampe. […] À quoi il faut ajouter la longueur des entr’actes ; passe encore en Italie, le théâtre y est un grand salon où l’on cause librement, où l’on fume dans les corridors en commentant la pièce même entre inconnus ; en Allemagne, malgré le confort moderne, c’est la raideur et l’ennui ; à Paris (sauf une ou deux exceptions) c’est pire encore : des sièges dont on sent la torture dès que le rideau se baisse, des corridors où l’on s’écrase, des vestibules à courants d’air, et le reste… D’un acte à l’autre, votre enthousiasme a le temps de se refroidir ou de se courbaturer ; l’auteur le sait ; il s’efforce de vous rallumer par un feu roulant de bons mots qu’il a patiemment recueillis dans les salons et qui n’ont d’ailleurs rien à faire avec l’action ni avec les caractères.

1104. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Charles Magnin ou un érudit écrivain. »

Ramée, jeune statuaire, plein de chaleur et d’enthousiasme, touchés l’un et l’autre du feu sacré, s’étaient mis en campagne ; ils avaient visité en pèlerins fervents et infatigables les monuments, les églises, les restes d’abbayes, et la théorie fondée sur l’observation était née ; elle avait apparu, un matin, lumineuse et manifeste. […] L’audace militante chez lui, comme chez la plupart, s’en était allée avec le feu de la jeunesse.

1105. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE KRÜDNER » pp. 382-410

Ainsi quand à Venise, au bal de la Villa-Pisani, Gustave, qui n’y est pas allé, passant auprès d’un pavillon, entend la musique, et, monté sur un grand vase de fleurs, atteint la fenêtre pour regarder ; quand il assiste du dehors à la merveilleuse danse du schall dansée par Valérie, et qu’à la fin, enivré et hors de lui, à l’aspect de Valérie qui s’approche de la fenêtre, il colle sa lèvre sur le carreau que touche en dedans le bras de celle qu’il aime, il lui semble respirer des torrents de feu ; mais, elle, n’a rien senti, rien aperçu. […] Une simple glace entre eux deux : d’un côté le feu brûlant, de l’autre l’affectueuse indifférence ! 

1106. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

Géruzez, auquel il dit cette parole d’une magnanime équité : « Voici des événements dont, plus que personne, nous profiterons ; c’est donc à nous d’y prendre part et d’y aider80. » Il se porta avec les attaquants vers le Louvre, du côté du Carrousel ; les soldats royaux faisaient un feu nourri dans la rue de Rohan, du haut d’un balcon qui est à l’angle de cette rue et de la rue Saint-Honoré ; Farcy, qui débouchait au coin de la rue de Rohan et de celle de Montpensier, tomba l’un des premiers, atteint de haut en bas d’une balle dans la poitrine. […] C’est pour cela qu’aujourd’hui il nous faut faire tête au premier rang des Lyciens, et nous lancer au feu de la mêlée, afin qu’au moins chacun des nôtres dise, etc., etc… » Pour Farcy les avantages à conquérir avaient certes moins de splendeur, et le grand domaine, c’eût été une chaire.

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