/ 2155
238. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre onzième »

Rousseau, consulté comme législateur par les peuples, était appelé comme pédagogue par les familles. […] La famille n’est ni si crédule, ni si commode. […] Qui donc le blâmerait de ne pouvoir être à la fois utile au genre humain et à sa famille ? […] Voilà donc la société et les familles accusées de déformer l’œuvre que la nature leur avait donnée parfaite. […] Qui donc lui donnait le droit de le prendre de si haut avec les pères de famille ?

239. (1890) L’avenir de la science « XV » pp. 296-320

Quel résultat historique que la classification des langues en familles, et surtout la formation de ce groupe dont nous faisons partie et dont les rameaux s’étendent depuis l’île de Ceylan jusqu’au fond de la Bretagne ! […] Les grandes religions asiatiques se grouperaient elles-mêmes en trois familles, ou plutôt se rattacheraient à trois souches : 1° famille sémitique (judaïsme, christianisme, islamisme) ; 2° famille iranienne (parsisme, manichéisme) ; 3° famille indienne (brahmanisme, bouddhisme). Dans l’intérieur de chaque famille, les réformes successives n’ont été que les développements d’un fond identique 140. […] La variété ici devient parfois presque individuelle, une simple affaire de famille. […] Au plus bas degré apparaîtrait le fétichisme, c’est-à-dire les mythologies individuelles ou de familles, les fables rêvées et affirmées avec l’arbitraire le plus complet, sans aucun antécédent traditionnel, sans que l’idée de leur vérité se présente un instant à l’esprit, pas plus que dans le rêve, la fable pour la fable.

240. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Le Comte Léon Tolstoï »

Lévine et sa femme, Karénine, Anna, Wronsky, le prince Oblonsky et la princesse Dolly, la famille Cherbatky, les amis et les amies de tous ces gens, les enfants, les serviteurs et les paysans, font du roman contemporain de Tolstoï, une œuvre enchevêtrée et confuse, comble et embrouillée qui choque déjà toutes les règles d’unité et d’élaguement qui nous sont familières ; mais qu’est cette complication devant celle des trois gros volumes de La Guerre et la Paix où les vies complètes du prince André, du prince Pierre, de Nicolas Rostow, mêlées aux destins des membres de leurs familles, entourés d’une foule véritable de satellites, de connaissances, se poursuivent à travers de grandioses récits de batailles, de négociations, d’entrevues, dans lesquelles figurent tous les personnages célèbres du temps, à travers les scènes populaires, rustiques et sociales qui constituent toute l’histoire politique et intime d’un peuple ? […] La main de l’écrivain écarte l’ombre, le lecteur aperçoit le cours et la variété de la vie humaine : il connaît le tout de ce monde mouvant et diapré ; les armées s’étreignent et se fondent, les familles se dispersent, se retrouvent, vieillissent et rajeunissent, les êtres croissent, s’apparient et meurent ; les campagnes se glacent et reverdissent, la masse des foules roule sous les palais ou dans le crépuscule, des hommes angoisses méditent sur la vie et la mort ; la lueur de la beauté se pose sur le front des jeunes femmes et s’y ternit ; le jeu changeant des nuances d’âme frémit, s’exalte, s’alanguit et s’active ; passent les visages contractés, souriants, roses ou glacés du froid de la mort, et tandis que cet emmêlement d’hommes et de choses s’insinue dans son intelligence et se projette au loin dans le monde vide de l’esprit, le lecteur frémit et s’égare dans cette évocation de tout l’existant, avec le trouble des vues trop vastes. […] Les maisons, les champs, les rues, les jours, les nuits, le train même de la vie, de l’histoire, de la société sont là ; on y trouve des hommes dignes d’amitié ou de haine, des femmes à aimer, des êtres à qui sourire et d’autres qui déplaisent ; les personnages ont le visage familier et humain, il y a des familles cordiales, de cérémonieux salons, des gens du peuple et des soldats ; les discussions s’engagent sur les éternels problèmes et l’on peut ensuite échanger les plus vains propos ; les êtres y aspirent, s’émeuvent et pensent avec l’infinie variété de nos semblables. […] Que l’on écarte toute idée de mièvrerie, de sensiblerie vertueuse, d’embellissement factice de la vérité ; il n’y a là aucune de ces effusions doucereuses, de ces feints attendrissements qui rendent odieux dans la littérature française les tableaux de la vie en famille ; mais la simple vérité virile et saine, comprenant les froissements, les conflits, les ridicules, le prosaïque de l’existence à plusieurs ; mais donnant aussi sa sûreté, sa dignité, sa douceur, sa gaîté, son aspect archaïque et patriarcal. […] Comme Tolstoï sait montrer le charme vrai de la vie de famille, il décrit encore et fait aimer le libre attachement des hommes entre eux, la camaraderie, l’amitié, la fraternité, l’affection et l’aide mutuelle des paysans d’une même commune, les beaux attachements des soldats d’une même troupe, l’en-masse des foules, ou plus individuellement la liaison de Wronsky avec ce grand officier lent de la garde Javshine, ou de Nicolas Rostow avec Denissow ; la vérité sans embellissement du récit est la même et provoque de cordiales adhésions.

241. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

Les Dante, les Machiavel, les Médicis, les Buonarotti, les Gondi, les Mirabeau, les Bonaparte étaient des familles étrusques. […] Sa famille, attachée par tradition au parti guelfe, était patricienne et consulaire dans la république. […] Cette inclination fut mutuelle, quoique contrariée par les circonstances de famille. […] À neuf ans, à un âge dont l’innocence ne laisse rien soupçonner d’impur, il rencontra dans une fête de famille Béatrice, jeune enfant, pleine de noblesse et de grâce. […] « Là il se trouvait au rendez-vous des générations, jouissant du même horizon qui sera celui du jugement universel, et qui embrassera toutes les familles du genre humain.

/ 2155