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812. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Gaie, modeste, pleine d’attentions, douée de la plus heureuse propriété d’expression, et d’une très grande promptitude de raison et de jugement, vous la prendriez pour la reine d’un poème allégorique. […] Walpole renouvelle à tout propos ces portraits de la jolie duchesse, et, puisque j’en suis à ces échantillons divers de son pinceau, j’ajouterai celui-ci encore, comme le plus complet et le plus ravissant de tous : La duchesse de Choiseul n’est pas fort jolie, mais elle a de beaux yeux, et c’est un petit modèle en cire qui, pendant quelque temps, n’ayant pas eu la permission de parler, comme en étant incapable, a contracté une modestie dont elle ne s’est point guérie à la Cour, et une hésitation qui est compensée par le plus séduisant son de voix, et que fait oublier le tour d’expression le plus élégant et le plus propre. […] Si correcte dans ses expressions et dans ses pensées !

813. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — II. (Fin.) » pp. 246-265

Il s’amusait à sceller, à faire l’office de garde des Sceaux, pendant que les autres étaient aux mains ; bon garde des Sceaux en temps de guerre, disait-on, et bon connétable en temps de paix : « Au fort de ses lâchetés, s’écrie Richelieu, il ne laissait pas de parler comme s’il était percé de plaies, tout couvert du sang des ennemis… » Au fort de ses lâchetés est une de ces expressions involontaires qui qualifient un grand et généreux écrivain. […] À la fin de ce portrait de Luynes, l’écrivain a, je ne sais comment, une fraîcheur et une légèreté d’expression qui ne lui est point ordinaire, et qui montre que cette âme n’était point destinée si absolument à la sécheresse et à l’austérité : Sa mort fut heureuse, dit-il, en ce qu’elle le prit au milieu de sa prospérité, contre laquelle se formaient de grands orages qui n’eussent pas été sans péril pour lui à l’avenir ; mais elle lui sembla d’autant plus rude, qu’outre qu’elle est amère, comme dit le Sage, à ceux qui sont dans la bonne fortune, il prenait plaisir à savourer les douceurs de la vie, et jouissait avec volupté de ses contentements. […] Ceci est léger et naïf d’expression, comme du Philippe de Commynes ou de l’Amyot.

814. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Marguerite, reine de Navarre. Ses Nouvelles publiées par M. Le Roux de Lincy, 1853. » pp. 434-454

Elle mêle et varie mainte fois tous ces noms de maître, de frère et de roi, qu’elle accumule en lui, et qui ne suffisent qu’à peine à exprimer son affection si pleine et si sincère : « Quoi que ce puisse être, jusques à mettre au vent la cendre de mes os pour vous faire service, rien ne me sera ni étrange, ni difficile, ni pénible, mais consolation, repos et honneur. » Ces expressions, qui seraient exagérées chez d’autres, ne sont que vraies dans la bouche de Marguerite. […] L’expression de sa physionomie, c’est la finesse sur un fond de bonté. […] À voir les passages des lettres dans lesquelles elle recommande Berquin, on dirait qu’elle épouse toutes ses opinions et sa créance ; mais il ne faut point demander à Marguerite tant de rigueur dans les idées et dans l’expression.

815. (1860) Ceci n’est pas un livre « Une préface abandonnée » pp. 31-76

Il serait temps cependant de s’entendre sur la portée exacte de cette expression. […] Je n’ai jamais compris pourquoi on séparait l’expression en littérature de la forme en peinture, en musique, en statuaire. […] Alors l’expression s’applique si vigoureusement sur la pensée qu’elle la modèle pour ainsi dire ; et l’image se déroule logiquement jusqu’au bout.

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