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1217. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — II. (Lettres écrites du donjon de Vincennes.) » pp. 29-50

Lorsque, décidément, le Mirabeau pamphlétaire eut cessé et que l’orateur eut levé la tête, quand il eut pris son grand rôle dans les assemblées des États de Provence et qu’il s’y fut dessiné comme tribun déjà et comme pacificateur tout ensemble, le vieillard, lisant la relation de ces scènes mémorables, s’écria : « Voilà de la gloire, de la vraie gloire !  […] Lucas-Montigny ; ils y verront à quel ensemble de circonstances, à quel concert d’efforts combinés Mirabeau dut enfin sa sortie du donjon de Vincennes ; ils y verront aussi les principales vicissitudes du procès qu’il soutint avec la famille de M. de Monnier, et les ressources de tout genre qu’il y déploya jusqu’à ce que les adversaires eussent senti l’utilité d’une transaction.

1218. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mademoiselle de Scudéry. » pp. 121-143

Et on se met d’examiner ce que doit être une conversation pour être agréable et digne d’une compagnie d’honnêtes gens ; et, pour cela, elle ne doit être ni trop limitée aux sujets de famille et domestiques, ni tournée aux sujets purement futiles et de toilette, comme il arrive si souvent aux femmes entre elles : « N’êtes-vous pas contrainte d’avouer, remarque un des interlocuteurs de Mlle de Scudéry, que qui écrirait tout ce que disent quinze ou vingt femmes ensemble, ferait le plus mauvais livre du monde ?  […] Bref, les plus aimables femmes du monde, quand elles sont un grand nombre ensemble et qu’il n’y a point d’hommes, ne disent presque jamais rien qui vaille, et s’ennuient plus que si elles étaient seules.

1219. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires de Marmontel. » pp. 515-538

C’est dans cette retraite dernière qu’il écrivit son plus agréable et son plus durable ouvrage, ses Mémoires : « C’est pour mes enfants que j’écris l’histoire de ma vie, dit-il en les commençant ; leur mère l’a voulu. » Il s’y trouve bien des choses qu’on est étonné, à la lecture, qu’il ait écrites pour ses enfants et à la sollicitation de sa femme ; mais cela forme un trait de mœurs de plus, et le ton général de bonhomie et de naturel qui règne dans l’ensemble du récit fait tout passer. […] Quatre ou cinq camarades logeaient ensemble chez quelque artisan de la ville ; chaque écolier avait avec lui ses provisions pour la semaine, ses vivres qui lui venaient de la maison paternelle : Notre bourgeoise nous faisait la cuisine, et pour sa peine, son feu, sa lampe, ses lits, son logement, et même les légumes de son petit jardin qu’elle mettait au pot, nous lui donnions par tête vingt-cinq sols par mois ; en sorte que, tout calculé, hormis mon vêtement, je pouvais coûter à mon père de quatre à cinq louis par an.

1220. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — II. (Suite.) » pp. 23-46

De l’autre côté, il y avait des intérêts civils, patriotiques aussi, mais surtout positifs, des idées longtemps étouffées et qui voulaient renaître ; idées en travail, intérêts en souffrance, lassitude profonde et besoin de paix, chez quelques-uns d’anciens sentiments qui se réveillaient, c’était tout un ensemble d’opinion déjà puissante et mal définie ; mais surtout, à ces premiers jours de 1814, et en face d’une religion militaire qui épuisait ses derniers miracles, il y avait une raison. […] Dans le traitement des sociétés, il est tout différent d’agir au hasard, sans préparation, sans consulter l’état moral de l’ensemble, ou de tenir compte de ces données générales qu’on dirige et qu’on modifie ensuite, mais qu’on ne supprime pas.

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