Il avait la taille d’un enfant et l’apparence la plus chétive, mais des yeux et un front indiquant la compréhension la plus vaste. […] Je suis tombé de surprise quand je me suis trouvé en présence de cette langue si simple, sans construction, presque sans syntaxe, expression nue de l’idée pure, une vraie langue d’enfant. […] Voici un enfant qui n’agit encore que par impulsion et imitation ; et c’est à cet âge qu’on lui fait jouer sa vie ; une puissance supérieure l’enlace dans d’indissolubles liens ; elle poursuit son travail en silence, et, avant qu’il commence à se connaître, il est lié sans savoir comment. […] Heureux les enfants qui ne font que dormir et rêver et ne songent pas à s’engager dans cette lutte avec Dieu même !
C’est en vertu de ce principe qu’il explique la formation de la société par les avantages qui résultent de la coopération, l’institution du gouvernement par l’utilité qu’il y a à régulariser la coopération militaire59, les transformations par lesquelles a passé la famille par le besoin de concilier de plus en plus parfaitement les intérêts des parents, des enfants et de la société. […] Mais, tandis qu’alors elle avait pour objet de sauvegarder les droits de propriété du père sur les enfants issus de la femme légitime, c’est bien plutôt le droit des enfants qu’elle protège aujourd’hui. […] C’est ainsi qu’on explique couramment l’organisation domestique par les sentiments que les parents ont pour leurs enfants et les seconds pour les premiers ; l’institution du mariage, par les avantages qu’il présente pour les époux et leur descendance ; la peine, par la colère que détermine chez l’individu toute lésion grave de ses intérêts.
Toujours est-il qu’il règne une grande obscurité sur La Fontaine enfant. […] Gustave Michaut, très diligent, très érudit, très consciencieux et très sûr, les rassemble pour nous, je veux bien vous les lire dans son volume : Certain enfant qui sentait son collège, Doublement sot et doublement fripon Par le jeune âge et par le privilège Qu’ont les pédants de gâter la raison… Ailleurs : Je ne sais bête au monde pire Que l’écolier si ce n’est le pédant. […] Il choisissait, pour mettre parmi les Fables, d’une part les Contes qui étaient courts, d’autre part les Contes qui n’étaient pas libertins, les Contes qui n’étaient pas licencieux et qu’à la rigueur les enfants pouvaient lire. […] Ce n’était certainement pas le cas pour les fables de La Fontaine, mais on voit qu’il a eu tout à fait l’idée que ses fables n’étaient peut-être pas des chefs-d’œuvre il était comme cela, personne n’a été plus modeste ensuite que c’était un livre d’éducation, un livre à mettre entre les mains des enfants et, par conséquent, qui comportait, qui appelait même les images.
éternellement printemps, éternellement grappe de lilas, éternellement violette des bois dans la rosée, éternellement enfant délicieux, mais enfant. […] — pour fêter cet enfant prodigue… prodigue de talent, et qui, comme celui de l’Évangile, ne gardera pas les pourceaux. […] s’il en fut jamais, puisque ces éphémères enfants d’un jour ont la manie innocente d’être modernes, et ne parlent que de modernité !