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728. (1891) Esquisses contemporaines

On a cru généralement que l’abus des expressions recherchées, le manque de simplicité qui caractérisent sa phrase, provenaient du désir de faire de l’effet. […] Le désir et la crainte, la tristesse et le souci n’existent plus  On se sent d’accord, sans agitation, sans tension quelconque. […] Elle assombrit les clartés natives qui réjouissaient nos yeux et détruit les apparences auxquelles se suspendaient nos désirs. […] Dans tout autre cas, on ne veut plus, on désire, et le désir est toujours le signe de l’impuissance. […] La volonté ne choisit pas ; elle abdique dans le désir ou se réalise par l’obéissance.

729. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Lamartine »

Nouveau retour à Milly, et, derechef, il rêve, s’ennuie, rime par-ci par-là, jette sur le papier ce qui lui vient, tourmenté de désirs vagues, d’une ambition indéfinie ; souvent malade du foie. […] Le temps s’écoule, les années se chassent, la vie s’en va : profitons de ce qui en reste ; donnons-nous un but fixe pour l’emploi de cette seconde moitié, et que ce but soit le plus élevé possible, c’est-à-dire le désir de nous rendre agréables à Dieu, hors duquel rien n’est rien. […] Non que le nom de Dieu soit ici prononcé ; mais, par le seul mouvement ascensionnel de l’amour et du désir, par l’évocation, dès le début, de la « nuit éternelle » et de l’« océan des âges », par la soif d’étendre son être, de le « relier » à l’univers (relligio) et de rattacher l’éphémère à l’éternel, la traditionnelle élégie épicurienne se trouve agrandie jusqu’aux étoiles… M.  […] Et plus leur fureur croît, et plus la sensation s’émousse : et de là une rage par laquelle le désir de sentir se confond enfin avec le désir de détruire. […] Nul, non pas même Renan, n’a mieux dit les sourds instincts dont le travail, pareil à celui des germes, prépare les transformations des peuples, ni les désirs dont les masses humaines sont émues longtemps avant que ces désirs ne deviennent des pensées par où la réalité sera repétrie… Écoutez ces strophes d’Utopie :     . . . . . . . .

730. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

Mais ma femme, toujours égale et libre dans la sienne, qui serait exempte de tout soupçon pour tout autre homme moins inquiet que je ne le suis, me laisse impitoyablement dans mes peines ; et, occupée seulement du désir de plaire en général, comme toutes les femmes, sans avoir de dessein particulier, elle rit de ma faiblesse. […] La scène a répondu à notre attente ; elle a été tout ce qu’elle devait être entre un homme déchaîné contre les vices du siècle, qui a le malheur de s’être passionné pour une femme atteinte de quelques-uns des plus haïssables, et cette même femme qui, dévorée du désir de subjuguer tous les cœurs, doit attacher un grand prix à soumettre et à conserver le cœur du sauvage Alceste. […] Mais ma femme, toujours égale et libre dans la sienne, me laisse impitoyablement dans mes peines ; et, occupée seulement du désir de plaire en général, sans avoir de dessein particulier, elle rit de ma faiblesse. » Tous les traits de ce tableau conviennent à Célimène, comme ceux du passage précédent convenaient au Misanthrope. […] Pour moi, je crois qu’au ciel tendent tous vos soupirs37 Et que rien ici-bas n’arrête vos désirs. […] Molière oppose ici d’une manière admirable la mysticité des expressions à la hideur des sentiments, et les pratiques de la piété aux désirs effrontés d’un libertin.

731. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1888 » pp. 231-328

Sur ce désir, Périvier prononce le mot : Ignotus, qui est agréé par Villemessant. […] Si près de la Bastille, moi, habitant d’Auteuil, qu’un hasard mène si rarement dans ces quartiers lointains, je me sens le désir de revoir ces vieux boulevards : ce boulevard Beaumarchais, ce boulevard des Filles-du-Calvaire, ce boulevard du Temple ; ces trois boulevards, qui d’un bout à l’autre exposaient à leurs vitres, et un peu en plein air, le musée du rococo ; — ces boulevards aux candides et sales boutiques de ferrouillats, ignorant encore la mise en scène et le montage de coup, par la brochure et la photographie, de l’objet d’art, montré sous un coup de jour, dans le clair-obscur d’un petit salon ad hoc. […] Car il a une énorme ambition, et le désir irrité de devenir le premier de tous, en peinture, en littérature, en musique, en tout. […] Vous savez, ce que vous me disiez du désir que vous avez eu de voyager autrefois en maringote, et vous vous rappelez les projets amusants des parcours des environs de Champrosay, faits ensemble, dans une de ces voitures. […] Peut-être, dans deux ou trois jours, cette foucade théâtrale sera-t-elle passée, mais aujourd’hui je suis mordu par le désir d’écrire ces pièces.

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