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434. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Gustave Flaubert. Étude analytique » pp. 2-68

L’Éducation sentimentale conduit, par l’infini dédale des lâches amours de Frédéric Moreau, de la rubiconde infamie d’Arnoux, à la double beauté de Marie Arnoux ; ce livre apprend à mesurer les extrêmes de l’humanité. […] Et la vie passe sur elles ; de petits incidents ont lieu : la bêtise d’une république succède à la niaiserie d’une royauté ; quelques années de vie de province s’écoulent en vides propos et minces occurences ; des entreprises sont tentées auprès d’elles, réussissent ou échouent sans qu’il leur importe, et dans ce plat chemin qui les conduit et tous à une formidable halte, elles ne sentent intensément que le malheur de songer à leur sort. […] L’étrange et bas palais de Constantin précède le festin farouche de Nabuchodonosor ; l’apparition de la reine de Saba galante et vieillote en son charme de chèvre ; dans le temple des hérésiarques la beauté flétrie, monacale et livide des femmes montanistes, le culte horrible des ophites, conduisent à l’évocation d’Apollonius de Thyane qu’un charme maintient suspendu sur l’abîme, planant et montant en sa noble robe de thaumaturge ;  le défilé des théogonies et sur la frise qu’a formée le pullulement des dieux brahmaniques, le Bouddha apparaissant assis, la tète ceinte d’un halo et sa large main levée ; le catafalque des adonisiennes, Aphrodite, puis l’immortel dialogue de la luxure et de la mort où les mots sont tantôt liquides de beauté, tantôt lourds de tristesse ; et ces dernières pages où tous les monstres se dégagent et se confondent en un protoplasme ’ qui est la vie même  quelle grandiose suite d’épisodes, dont chacun figure une plus charmante ou rayonnante ou tragique beauté. […] Le pessimisme que provoquait en lui la nostalgie du beau et la vue d’êtres et d’objets sans noblesse, se compliquait de celui qui affecte tous les artistes, l’acuité » pour ressentir la souffrance que cause l’excès général et délicat de la sensibilité, le pessimisme sociologique, « l’indignation » à propos de tout que donne aux grandes intelligences la vue de la bêtise se passant d’eux pour se mal conduire, la lassitude qu’implique chez l’artiste moderne sa vie d’être inutile, spolié de tout, intérêt humain4.

435. (1856) Cours familier de littérature. I « IVe entretien. [Philosophie et littérature de l’Inde primitive (suite)]. I » pp. 241-320

Le roi dont il conduit les chars veut aspirer pour lui-même au choix de Damayanti. Il charge Nala de préparer ses coursiers, et de le conduire à la cour du roi dont Damayanti est la fille. […] Ces coursiers efflanqués et amaigris n’auront ni la force ni la rapidité nécessaires pour me conduire en un jour au royaume de Damayanti.” […] XXXVI « C’était le soir », dit le poète ; « le char conduit par Nala ébranla la ville de Damayanti du bruit de ses roues ; les chevaux de Nala, qui ne l’avaient point oublié, entendirent ce bruit, qui retentit jusque dans leur écurie.

436. (1857) Cours familier de littérature. III « XIIIe entretien. Racine. — Athalie » pp. 5-80

La jeunesse doit toujours se laisser conduire et tâcher de ne point s’émanciper. […] C’est que le poète tragique est conduit à ne peindre que des péripéties ou des convulsions suprêmes de l’âme de ses personnages, et que tous les sentiments doux, habituels, modérés du cœur humain, sont retranchés forcément de sa poésie. […] Par quels secrets ressorts, par quel enchaînement Le ciel a-t-il conduit ce grand événement ? […] Et qui sait, lorsqu’au trône il conduisit vos pas, Si pour sauver son peuple il ne vous gardait pas ?

437. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XVIII. »

Le proconsul de Bithynie, Pline le Jeune195, dans sa lettre à Trajan sur les chrétiens, qu’il a interrogés par la torture et fait conduire à la mort quand ils refusaient d’abjurer, après avoir noté le secret de leurs assemblées et l’innocente sobriété de leurs repas, a soin d’ajouter, d’après leurs déclarations, qu’ils chantent en chœur un hymne au Christ, comme à un Dieu. […] toi qui, de la turbulence de la mer et de la fureur des flots, retires les poissons purs séduits par une douce aurore, conduis-nous, Pasteur du troupeau spirituel ! conduis-nous, saint roi de la chaste enfance ! […] Conduis-moi, aujourd’hui même, au but de ma route. » On le comprend, au reste : quelque belle que soit par moment cette poésie, les tons doivent en être peu variés ; la tristesse religieuse qui en est l’âme en fait l’uniformité.

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