Un drame musical, donc une œuvre de musique dont la musique est motivée par les péripéties d’une aventure ; or, un scénario enseigne l’aventure aux auditeurs, les paroles que les interprètes chantent en français notent les moments de l’aventure ; comment alors ne pas suivre et saisir parfaitement le sens littéraire de la musique, la signification du développement émotionnel qu’est le drame musical ? […] Siegmund debout, arrachant la miraculeuse épée, quand l’orchestre répand ses prodigieuses fanfares ; et, les yeux fermés ou les yeux ouverts, pendant que chante la musique et que les paroles résonnent portées par des voix aussi absolument abstraites que les instruments de l’orchestre, volontiers nous localisons paroles et musiques, et, bien aisément, spontanément, nous recréons votre action scénique, votre mimique, vos décors et tout le drame. […] C’est une parole qui doit être chantée purement et prononcée précisément, parce que pureté et précision sont l’essence de cette parole. […] Scaria, ne devant pas chanter cette année à Bayreuth, sera remplacé dans les rôles de Gurnemanz et de Mark par M. […] Lohengrin s’y chante en anglais, et l’on nous promet, pour le 15 mars.
Un poète vint, qui avait toutes les qualités de Racan à un degré supérieur et qui y joignait quelques mérites nouveaux ; qui aimait d’une sincérité première et spontanée, et qui, d’un accent plus pénétré, chantait comme les plus précieux des biens, ce qui n’était pour Racan que des consolations. […] Il veut surtout « chercher aux parfums des sens cachés » ; et il nous chante « le poème des parfums ». […] Elles chantent en termes lyriques Bernard de Ventadour, « le poète ineffable de l’amour ». Immédiatement après cette qualification grandiloquente mais un peu vague, Charles-Brun, qui prévoit jusqu’aux moindres objections, s’écrie : « Et je n’entends point le perdre de la sorte dans une troupe mélodieuse de troubadours occitans qui chantèrent aussi la passion souveraine. » Cette phrase me fit espérer une définition critique du talent de Bernard de Ventadour. […] Puis des combats sont chantés d’un souffle qui ne se soutient pas mais qui par instants est singulièrement vaillant : même, une fois, en décrivant l’assaut de Delhi, Mauclair ajoute la couleur à ses dons ordinaires et la page est d’une poésie rouge et noire vraiment émouvante.
J’ai connu un excellent musicien qui avait ce défaut de prononciation ; lorsqu’il se trouvait arrêté, il se mettait à chanter d’une manière fort agréable, et parvenait ainsi à articuler. […] Nous trouvons partout des Sibylles chez les plus anciennes nations : or, on assure qu’elles chantaient leurs réponses en vers héroïques, et partout les oracles répondaient en vers de cette mesure. […] Ce qui est plus certain, c’est que les fondateurs de la civilisation grecque furent les poètes théologiens, lesquels furent aussi héros et chantèrent en vers héroïques. […] De là vint, chez les Romains, l’usage mentionné par le même Cicéron ; les enfants chantaient la loi des douze tables, tanquam necessarium carmen . Ceux des Crétois chantaient de même la loi de leur pays, au rapport d’Élien. — À ces observations joignez plusieurs traditions vulgaires.
Dans notre France surtout, de ce côté-ci de la Loire, au sein des provinces centrales et passablement prosaïques de Picardie, Berry et Champagne, il n’y eut guère, à aucune époque, de poésie populaire proprement dite, de poésie vivante et chantée ; seulement la malice des fabliaux circula ; la moquerie, la jovialité de certains mystères, répondirent au bon sens railleur et matois des populations. […] Sans doute on chante, on chantera longtemps et toujours en France.