C’est, du reste, Musset qui, dans Une soirée perdue, à propos du Misanthrope, a le mieux marqué la différence essentielle des deux théâtres, le théâtre d’intrigue et le théâtre de pensée, le théâtre qui amuse et celui qui émeut, en montrant le prix d’une pièce comme le Misanthrope au regard de celles qui visent avant tout à « servir à point un dénouement bien écrit », du théâtre qui se tient au niveau de la vie ou s’élève au-dessus d’elle, en comparaison de celui qui atteint son but : Si l’intrigue, enlacée et roulée en feston, Tourne comme un rébus autour d’un mirliton.
Elle ne devient un art que lorsqu’elle prend conscience d’elle-même, qu’elle se systématise, obtient des effets voulus, et se propose un but.
La richesse ne saurait être le but final, puisqu’elle n’a de valeur que par les jouissances qu’elle procure.
Plus adroit, plus heureux dans ses dénouemens que le premier ; plus décent, plus moral que le second, il ne perd jamais de vue le but de la vraie Comédie, qui est de corriger les hommes, de guérir leurs travers, en les amusant.