Sous prétexte que toucher ou convaincre son lecteur, c’est sacrifier l’art en le subordonnant à une autre fin que lui-même, on vide son discours de toute vérité, que la raison, la conscience ou le cœur pourraient saisir : on poursuit une beauté toute matérielle et physique, que nul mélange du vrai, du bien, du beau moral même ne vient corrompre, et l’on travaille son style pour l’œil et l’oreille du public : on se fait ciseleur, coloriste ; on sculpte des phrases marmoréennes, on exécute d’étourdissantes variations ; on a une riche palette, un clavier étendu. […] Il n’y a pas d’idées, de sentiments qui vaillent la peine d’être préférés : il y a des phrases qui méritent d’être écrites, des phrases belles, des phrases bien faites. […] Il est des jeunes gens qui écrivent d’un style naturel et simple, quand ils s’abandonnent, et ne songent pas à ce qu’ils font : quand ils croient penser, quand ils veulent écrire, arrivent les grands mots et les belles phrases, le style drapé, guindé, important, à moins que ce ne soit le langage maniéré, alambiqué, quintessencié, qui coupe les idées en quatre, et danse sur les pointes d’aiguilles.
»), — si ce n’est point par terreur qu’ils montrent une si belle patience, c’est donc dans la pensée qu’ils pourront, dans un an, être cruels à leur tour. […] Entre le don littéraire, le don de sentir et d’exprimer le beau, et notre vie morale, un lien existe, assez facile à percevoir. […] Ce serait beau en son genre, si ce n’était funeste.
Interdit du théâtre, il s’était jeté dans les sciences et avait composé l’Atlantide ; pauvre, il monta dans la chaire de l’Athénée ; il dota les lettres françaises de ce Cours de littérature qui est un des plus beaux monuments que la science de l’antiquité ait élevés parmi nous. […] Une page de plus et vous aurez beau le chercher, vous serez réduit à dire comme le bon […] Édouard Fournier Quand vint la guerre des Hellènes, Lemercier y apporta ses hymnes de combat ; il publia une belle et fière traduction des Chants héroïques des montagnards et matelots grecs.
On aura beau prendre pour héroïne une vestale grecque ou romaine, jamais on n’établira ce combat entre la chair et l’esprit, qui fait le merveilleux de la position d’Héloïse, et qui appartient au dogme et à la morale du christianisme. […] La grâce répand autour d’elle ses rayons les plus sereins ; des anges lui soufflent 44 tout bas les plus beaux songes. […] Qui ne sent combien elle est belle et dramatique, cette opposition que Pope a voulu faire entre les chagrins et l’amour d’Héloïse, et le calme et la chasteté de la vie religieuse ?