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981. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIe entretien. L’Imitation de Jésus-Christ » pp. 97-176

Leur récompense est dans la conscience de leur auteur. […] On s’est éternellement disputé sur l’auteur de ce livre unique. […] Dieu n’a pas permis qu’on sût par quel organe ce flot de sa sagesse avait passé ; il a voulu que l’ouvrage fût immortel et l’auteur ignoré. […] Ce serait une preuve de l’authenticité de l’auteur, s’il en fallait d’autre. […] L’ouvrage était déjà célèbre, et l’auteur, inconnu.

982. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE VIGNY (Servitude et Grandeur militaires.) » pp. 52-90

Les poëmes recueillis en 1822, Éloa publiée en 1824, eurent peu de succès, et, sans la prose de Cinq-Mars, en 1826, le nom de l’auteur restait longtemps encore inconnu. […] faites-nous des Cinq-Mars, disait-on de toutes parts à l’auteur, c’est là votre genre. » Succès injurieux ! […] D’autres circonstances préliminaires, bonnes à relever, ont influé encore sur cette dernière phase du talent de l’auteur. […] Pour emprunter des paroles à l’auteur lui-même, je dirai aussi : Tout cela est très-bien, très-pur, très-dèlicat ; d’un vrai idéal, et à ravir26. […] Paul Lacroix était auteur d’un volume intitulé les Soirées de Walter Scott.

983. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « De la tradition en littérature et dans quel sens il la faut entendre. Leçon d’ouverture à l’École normale » pp. 356-382

C’est lui, l’auteur de Werther et de Faust, et qui s’y connaissait, qui a dit ce mot si juste : « J’appelle le classique le sain, et le romantique le malade. » Comme le classique, et même le romantique, font partie de la tradition, à la considérer dans toute sa série et dans l’étendue du passé, j’ai à m’arrêter à ce mot de Goethe, et je veux chercher à me l’expliquer devant vous. […] J’estime fort, par exemple, ces thèses que l’on voit se produire chaque année sur des sujets spéciaux, et où l’auteur a souvent cherché à creuser plus avant qu’on ne l’avait fait, à ajouter quelque chose à ce qu’on savait déjà ; je m’y instruis ; vous en ferez vous-mêmes bientôt, messieurs, et de bonnes, et même de neuves, j’espère. […] Nous tâcherons, en parlant d’eux, que l’éloge porte sur la qualité principale ; car il y a, même chez les grands auteurs, une qualité principale. […] Je n’irai, point, chez un auteur, louer l’art, là où il y a surtout force et grandeur. […] J’ai souvent remarqué que, quand deux bons esprits portent un jugement tout à fait différent sur le même auteur, il y a fort à parier que c’est qu’ils ne pensent pas en effet, pour le moment, au même objet, aux mêmes ouvrages de l’auteur en question, aux mêmes endroits de ses œuvres ; que c’est qu’ils ne l’ont pas tout entier présent, qu’ils ne le comprennent pas actuellement tout entier.

984. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Nouvelle correspondance inédite de M. de Tocqueville (suite et fin.) »

Le modèle inimitable de ce genre est dans le livre de Montesquieu sur la Grandeur et la Décadence des Romains : on y passe, pour ainsi dire, à travers l’histoire romaine sans s’arrêter ; et cependant on aperçoit assez de cette histoire pour désirer les explications de l’auteur et pour les comprendre. […] Ici il n’y a pas de quoi s’offenser : c’est l’auteur même qui parle, qui se démontre, et la dissection ne porte que sur les procédés de l’intelligence ; ce que l’auteur ajoute sur sa disposition morale est digne de ce qui précède, et résume nettement sa profession de foi politique : « J’ai l’orgueil de croire que je suis plus propre que personne à apporter dans un pareil sujet une grande liberté d’esprit, et à y parler sans passion et sans réticence des hommes et des choses : car, quant aux hommes, quoiqu’ils aient vécu de notre temps, je suis sûr de n’avoir à leur égard ni amour ni haine ; et quant aux formes des choses qu’on nomme des constitutions, des lois, des dynasties, des classes, elles n’ont point, pour ainsi dire, je ne dirai pas de valeur, mais d’existence à mes yeux, indépendamment des effets qu’elles produisent. […] Ne pourrait-on pas demander à l’auteur de la Démocratie (et c’est la seule critique que je hasarde) un peu moins d’amour-propre pour l’homme, un peu plus d’amour pour la démocratie elle-même, pour l’humanité en masse ? […] Tocqueville est un auteur si distingué et dont la réputation gagnera tellement dans l’avenir, qu’on ne doit pas craindre d’insister et d’appuyer à son sujet. […] Les choses flatteuses que vous avez bien voulu dire sur mon ouvrage m’auraient causé beaucoup d’orgueil et de joie, de quelque part qu’elles vinssent ; mais le nom de l’auteur de l’article ajoute encore à mes yeux un nouveau prix à ce que contient d’aimable l’article même.

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