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1545. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « De Cormenin (Timon) » pp. 179-190

Ce sont enfin ces portraits d’orateurs, que l’auteur a retouchés pourtant et auxquels il a voulu donner l’unité et le corsé d’un livre, ce sont ces portraits qui, au lieu de grandir Cormenin, vont le diminuer et dissiper l’erreur brillante de sa renommée. […] Seulement, comme, au bout du compte, dans ce Livre des Orateurs, il faut bien pourtant que le tour des orateurs arrive, on prend patience en traversant ces généralités communes ; mais les orateurs que l’auteur nous amène ne sont pas encore ceux que nous attendions. […] Il n’y a donc qu’à la Restauration que l’intérêt commence à poindre, puisque l’auteur a vécu sous la Restauration comme sous la monarchie de Juillet.

1546. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Swift »

Cette instruction, divisée par chapitres et où nul n’est oublié du personnel de la valetaille : le butler (sommelier), la cuisinière, le laquais, le cocher, le groom, l’intendant, le portier, la femme de chambre, la fille de service, la fille de laiterie, la bonne d’enfants, la nourrice, la femme de charge et la gouvernante ; ce mandement d’un doyen que Mascarille, après boire, refuserait de signer, ne peut être évidemment qu’une mystification immense et même une mystification à commencer par l’auteur lui-même, — car rien ne doit équivaloir, non seulement pour un esprit élevé, mais pour un esprit quelconque, au dégoût d’écrire, dans quelque but de raillerie que ce soit, ces conseils de friponnerie et de bassesse où tout le sens est dans la grosseur de l’ironie et dans une impudence égale entre l’idée et le langage… Et ce n’est pas tout. Après ces premiers conseils dont nous ne pouvons rien citer, on en trouve d’autres à un jeune poète, dans lesquels, si le sujet est moins ignoble, l’auteur n’en continue pas moins son éternelle et implacable ironie. Pour être poète, dit le terrible et opiniâtre railleur, qui ne se déferre jamais de sa plaisanterie effrayante de vulgarité, il faut d’abord « ne pas croire à Dieu et lire la Bible pour y prendre des métaphores ; — ne rien savoir, puisque les plus beaux génies de ce temps n’ont pas, en connaissances, de quoi couvrir une pièce de six pence au fond d’une cuvette ; — traiter tous les auteurs comme des homards, dont on choisit le meilleur dans la queue et dont on rejette le reste au plat ; — avoir toutes prêtes des comparaisons comme le cordonnier a ses formes ».

1547. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Th. Gautier. Émaux et Camées »

Sympathique ou antipathique, le talent de l’auteur de La Comédie de la mort est passé à l’état de fait que tout le monde voit, une dure et brillante chose, plus brillante et plus dure encore que des émaux et des camées. […] selon nous, voilà un progrès, — relatif, il est vrai, — mais un progrès, pourtant, dont il faut tenir compte, car c’est un élargissement dans l’idée et dans la manière de l’auteur, la manière, cette cire dont l’idée est le sceau ! […] Et ceci, qu’on nous comprenne bien, nous ne le disons point contre l’auteur d’Émaux et Camées dont nous venons, au contraire, de signaler les modifications heureuses en souhaitant qu’elles continuent.

1548. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Gères. Le Roitelet, verselets. »

… L’auteur nous était inconnu, — aussi inconnu que s’il débarquait de la Chine ! […] III Ce serait presque une anthologie avec un seul poète, — une anthologie non pas grecque de sentiment, car l’auteur du Roitelet n’a dans l’inspiration aucun archaïsme, mais grecque par cette brièveté pleine qui, en quelques vers, enferme ou concentre toute une perspective et fait un poème comme un disque, car, chez les Grecs, rondeur voulait dire perfection ! […] L’auteur du Roitelet a cela de caractéristique que, moins il prend dans la langue, plus il prend dans la pensée.

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