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1315. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Comte de Gramont »

Il les a écrits, ou plutôt il les a gravés, de 1830 à 1848, avec la patience de l’amour et sa longue caresse. […] Épée, on peut sur toi reposer ses amours : Car, sanglante et ternie, un éclair à ta pointe, Pour répondre au regard, se redresse toujours.

1316. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Belmontet »

Entraîné, comme notre siècle, vers la prose, qui est l’action dans la pensée écrite, comme la poésie en est la contemplation ou le rêve, nous n’avions pas eu, du reste, depuis que nous écrivons ce bulletin56, beaucoup de chefs-d’œuvre à sacrifier à cet amour sévère de la prose, qui est la préférence réfléchie des longues civilisations. […] Lamartine et Victor Hugo étaient, quand ils chantaient l’Empereur, des royalistes ardents, presque romanesquement dévoués au gouvernement qui avait remplacé l’Empire, et Béranger lui-même, qu’on a voulu dernièrement nous donner comme impérialiste et qui n’est que républicain, Béranger n’eut jamais non plus l’amour de l’Empereur ni la foi aux choses de l’Empire.

1317. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Charles Monselet »

Et il en rapporte des histoires comme celle qu’il a intitulée Clorinde : C’était une petite blonde, Née à seize ans et morte à vingt ; et qui s’en est allée de la vie : L’estomac ruiné de Champagne Et le cœur abîmé d’amour. […] Ou ailleurs (dans Seule) : Son cœur, son pauvre cœur jusqu’à la mort fidèle, S’était pris sans espoir d’un amour éclatant !

1318. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre VII. De la physique poétique » pp. 221-230

Les solides eux-mêmes, ils les réduisaient aux chairs, viscera [vesci voulait dire se nourrir, parce que les aliments que l’on assimile font de la chair] ; aux os et articulations, artus [observons que artus vient du mot ars, qui chez les anciens Latins signifiait la force du corps ; d’où artitus, robuste ; ensuite on donna ce nom d’ars à tout système de préceptes propres à former quelques facultés de l’âme] ; aux nerfs, qu’ils prirent pour les forces, lorsque, usant encore du langage muet, ils parlaient avec des signes matériels [ce n’est pas sans raison qu’ils prirent nerfs dans ce sens, puisque les nerfs tendent les muscles, dont la tension fait la force de l’homme] ; enfin à la moelle, c’est dans la moelle qu’ils placèrent non moins sagement l’essence de la vie [l’amant appelait sa maîtresse medulla, et medullitùs voulait dire de tout cœur ; lorsque l’on veut désigner l’excès de l’amour, on dit qu’il brûle la moelle des os, urit medullas]. […] Ce qui le prouve, c’est qu’Achille, qui fait tant de bruit pour l’enlèvement de Briséis, et dont la colère suffit pour remplir une Iliade, ne montre pas une fois dans tout ce poème un sentiment d’amour ; Ménélas, qui arme toute la Grèce contre Troie pour reconquérir Hélène, ne donne pas, dans tout le cours de cette longue guerre, le moindre signe d’amoureux tourment ou de jalousie.

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