On lit trois romans, Manon Lescaut, Gil Blas, Paul et Virginie, et aussi les contes de Voltaire, qui sont courts et très alléchants. […] Le théâtre de Voltaire et celui de Corneille ont leurs scènes choisies, leurs beautés séparables : le théâtre de Racine n’en a point. […] Il est probable que Voltaire et Gœthe ont définitivement clos la liste des génies universels. […] Le malheur de Voltaire, et ce sera aussi celui de Victor Hugo, est qu’il lui est impossible de « s’arranger de façon à faire croire à la postérité qu’il n’a pas vécu ». […] ou, pour user d’une pittoresque image des Grecs, quel bœuf un Pierre l’Hermite aurait eu sur la langue au siècle de Voltaire !
Voltaire ou Nisard n’auraient pas mieux dit. […] On n’ignore pas que Voltaire ne fut pas un saint mais M. […] Dans la fameuse querelle de Voltaire et de Rousseau, M. […] Voltaire n’a jamais vu la France en danger. […] C’est Voltaire qui avait raison contre Jean-Jacques.
Voltaire, dont chaque mot compte quand il s’agit de peindre les hommes qu’il a connus et qu’il définit avec son heureuse précision, a dit de lui dans son Siècle de Louis XIV, en le rencontrant pour la première fois sous sa plume à l’assaut de Prague (1741) : « Le comte Maurice de Saxe, frère naturel du roi de Pologne, attaqua la ville. […] Voici un passage où le maréchal parle de Voltaire, et avec esprit certainement. […] La race poétique ne prend pas la chose si fort à cœur. — Voltaire a donné deux tragédies depuis la mort de Mme du Châtelet : on le disait mort aussi, parce qu'on le croyait fort attaché à cette dame.
On était au lendemain du jour où l’Assemblée avait décerné des honneurs suprêmes à la mémoire de Voltaire et décrété la translation de ses restes au Panthéon. […] En voici le début qui donne le ton ; « L’Assemblée nationale venait de décerner des honneurs à la mémoire de Voltaire : c’est le lendemain de ce jour qu’on lui annonce une lettre de vous. […] Voltaire, Montesquieu, Rousseau, Mably sont morts avant d’avoir vu fructifier les germes qu’ils avaient semés dans les esprits : vous vivez, vous qui avez avec eux préparé les voies de la liberté ; et, comme dans ces associations ingénieuses où les vieillards qui survivent héritent de toute la fortune de leurs confrères morts, on se plaisait à voir accumuler sur votre tête le tribut de reconnaissance et d’hommages que l’on ne peut plus offrir qu’à leur cendre… » L’abbé Raynal, devenu homme de génie à l’ancienneté, en héritant successivement des morts, et par le mouvement naturel de la tontine des réputations, un homme de génie par survivance, c’était bien cela !