/ 2020
228. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Note »

« J’y ajoute des remarques pour éviter de certaines erreurs biographiques, telles que, par exemple, cette supposition entièrement fausse que j’ai été mal avec mon père. » Par malheur, le dossier ne renfermait aucune des notes indiquées, mais seulement quelques pensées ou remarques étrangères à l’intérêt biographique. […] « Quiconque a tous ses sens et ses membres et possède des amis, quiconque n’est pas jeté pour jamais sur une terre étrangère, ni détenu dans les repaires de l’oppression, et n’a pas dans l’âme des causes de trouble irréparable, ne doit jamais se dire tout à fait malheureux. […] À plus forte raison des livres dont le sujet et la manière conviennent très-peu au xixe siècle français ne peuvent-ils faire sensation dans le public… « S’il me survient assez tôt des circonstances qui me mettent en état de vivre, je me féliciterai fort d’être resté étranger au commérage du monde ; de n’avoir point eu de rapport en général avec ceux pour qui vivre, c’est être en place ; de n’avoir vu que de loin les meneurs :de n’avoir pas ajouté à mes misères leurs vaines passions et de n’avoir pas mis la main à leur petit feu d’artifice… (Ici une lacune.) 

229. (1900) L’état actuel de la critique littéraire française (article de La Nouvelle Revue) pp. 349-362

Marcel Schwob parle comme seul Mallarmé savait le faire d’une certaine critique psychologique de la littérature étrangère. […] Et une pareille organisation, transportée à l’étranger, créerait un échange international de volumes sobres, débordants de pensée concentrée, qui enrichiraient les bibliothèques et constitueraient, à côté de la bibliographie effective, un memento intellectuel de premier ordre. […] Ainsi serait constituée la Critique nationale, qui saurait répondre avec clarté, devant l’étranger, de la qualité, de la mission et de la marche de notre génie.

230. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie-Antoinette. (Notice du comte de La Marck.) » pp. 330-346

Bien qu’elle ne vît jamais toute l’étendue de ces inconvénients, elle en aperçut pourtant quelque chose ; elle sentait que là où elle cherchait le repos et le délassement du rang suprême, elle retrouvait encore une obsession intéressée, et quand on lui faisait remarquer qu’elle témoignait souvent trop de préférence à des étrangers de distinction qui passaient en France, et que cela pouvait lui nuire auprès des Français : « Vous avez raison, répondait-elle avec tristesse, mais ceux-là du moins ne me demandent rien. » Quelques-uns des hommes qui, admis dans cette intimité et cette faveur de la reine, étaient obligés à plus de reconnaissance et de respect, furent les premiers à parler d’elle avec légèreté, parce qu’ils ne la trouvaient pas assez docile à leurs vues. […] Le prince de Ligne en ce temps-là venait souvent en France, et c’était un de ces étrangers tout français et tout aimables avec lesquels se plaisait particulièrement la reine. […] Elle voulait le salut de l’État par son frère l’empereur, par les puissances étrangères, mais point par les émigrés.

231. (1876) Du patriotisme littéraire pp. 1-25

Bersot : « Notre langue est bien française… elle mérite bien qu’on la recommande à ceux qui la parlent pour qu’ils l’aiment, la respectent et en soient fiers devant l’étranger… Elle est ce que l’écrivain la fait, ou plutôt elle est ce qu’il est, s’empreint de son génie et de sa passion ; elle est à la fois langue de Racine et de Corneille, de La Rochefoucauld et de La Fontaine, de Voltaire, de Rousseau, de Sévigné, de Fénelon, de Pascal, de Bossuet, ne résistant qu’à ceux qui risquent d’altérer sa clarté ou qui prétendent forcer son incomparable justesse. […] C’est dans tous les genres que, du règne d’Henri IV à la Révolution, notre Prose multiplie ses chefs-d’œuvre ; pamphlets vengeurs tels que la Ménippée et les Provinciales, pensées, maximes, portraits, mémoires, traités de morale, correspondance, éloquence sacrée, histoire, comédie, roman, conte, rien ne lui est étranger. […] Et si les étrangers parurent désapprendre leur génie national, ils ne firent en réalité que le retremper à la meilleure des disciplines, à la seule école où se fût accomplie depuis l’antiquité la grande harmonie du Vrai et du Beau !

/ 2020