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430. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVI. Miracles. »

Quant aux miracles, ils passaient, à cette époque, pour la marque indispensable du divin et pour le signe des vocations prophétiques. […] La médecine était à cette époque en Judée ce qu’elle est encore aujourd’hui en Orient, c’est-à-dire nullement scientifique, absolument livrée à l’inspiration individuelle. La médecine scientifique, fondée depuis cinq siècles par la Grèce, était, à l’époque de Jésus, inconnue des Juifs de Palestine.

431. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les Kœnigsmark »

Philippe de Kœnigsmark, — dont l’Hisloire n’a dit qu’un mot et à voix basse, car le métier de l’Histoire est de tout savoir, et la honte d’ignorer se mêlait pour elle à l’ignorance et au mystère, ce héros byronien, avant Byron, qui disparaît comme Lara ou comme le Corsaire, dont les uns disaient qu’il avait été jeté dans un four par la jalousie de Georges Ier, roi d’Angleterre, et les autres qu’il avait été enterré sous une des feuilles du parquet de sa royale maîtresse, Sophie-Dorothée, — Philippe de Kœnigsmark sort enfin des ténèbres qui pesaient sur son tombeau, et il en sort avec tout un monde que l’Histoire n’a pas vu, dans l’éblouissement d’une époque qui nous a trop longtemps aveuglés de sa gloire et qu’il faut aujourd’hui savoir juger ! Et cette époque, le croira-t-on ? […] C’était une simple femme au cerveau de femme, au cœur de femme, aux passions de femme, mais, après tout, un de ces êtres rares dans toute histoire, et qu’à l’époque où elle vécut on aurait jugée impossible.

432. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Collé »

Il n’a aucun enthousiasme pour les dominateurs intellectuels qui firent, à cette époque, de l’enthousiasme un incendie. […] Aimer sa femme et se vanter de l’aimer, ce qui est plus fort dans le temps où l’épicurisme de Richelieu et du chevalier de Faublas était à la mode, double courage en ce grivois de chansonnier si profondément à part de son époque, de son théâtre, et du genre de génie qu’il avait, mais qu’il n’avait pas seul ! […] C’est presque comique… Plutôt que de convenir franchement de la valeur des jugements de ce chansonnier qui, entre deux chansons, se permet en prose incisive de toiser Voltaire et Rousseau et leur époque tout entière, ou de se rebiffer et de dire bravement, avec ce poltron de Sosie : Comme avec irrévérence Parle des dieux ce maraud !

433. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Charles Baudelaire. Les Fleurs du mal. »

À une époque aussi dépravée par les livres que l’est la nôtre, Les Fleurs du mal n’en feront pas beaucoup, nous osons l’affirmer. […] Il y a du Dante, en effet, dans l’auteur des Fleurs du mal, mais c’est du Dante d’une époque déchue, c’est du Dante athée et moderne, du Dante venu après Voltaire, dans un temps qui n’aura point de saint Thomas. […] Il appartient à une époque troublée, sceptique, railleuse, nerveuse, qui se tortille dans les ridicules espérances des transformations et des métempsychoses ; il n’a pas la foi du grand poète catholique qui lui donnait le calme auguste de la sécurité dans toutes les douleurs de la vie.

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